Publié dans Bouquinade, Litté de l'imaginaire (SF, Fantasy, Fantastique)

Eversion (Alastair Reynolds)

Amis du jour, bonjour !

Je vous parle souvent de ces romans qui croisent ma route au hasard d’une balade sur les réseaux ou d’une discussion avec les copines. L’occasion d’acheter celui-ci s’est présentée lorsque, après avoir entendu Armance en parler, je l’ai trouvé en librairie…

Le Pitch :
Silas Coad est médecin à bord de la goélette Demeter et file le long des côtes de la Norvège, dans une expédition financée par un riche commanditaire à la recherche d’une sorte d’anomalie. Une structure si grande qu’elle en est presque inconcevable, et dont personne n’est jamais revenu… Bientôt, d’étrange événement pousseront le lecteur à s’interroger sur cette étrange expédition…

Mon avis :
Il est indéniable que la plume d’Alastair Reynolds n’a rien à prouver. Raffinée, élégante, elle entraîne dans ses volutes un lecteur qui se laisse endormir… avant de brusquement le réveiller et de partir ailleurs comme rien ne s’était passé. J’étais perdue ! Un premier élément perturbateur, coup de bigot à une proximité (comme dirait l’autre) pour lui demander si c’est moi qui ne comprends rien où si c’est le roman qui me trimballe comme un vieux chiffon. « Eh eh » me répond-elle. Ok, je m’y replonge. Et voilà qu’il recommence, je n’ai plus aucun repère, ni où, ni quand, et ça ne semble choquer personne. Mais enfin, va-t-on m’expliquer ce qu’il se passe ?

Vous le saurez si un jour vous avez, ou avez eu, Eversion entre les mains. Je peux seulement vous dire que c’est un voyage qu’il vous faudra entreprendre aux côtés de Silas Coad ; laissez Alastair Reynolds faire sa tambouille, et suivez docilement. Plus que dans La Millième Nuit, il a été question ici de mathématiques, de géométrie et de tout un tas de trucs métaphysiques auxquels personnellement je n’ai pas compris grand chose. Là encore, pas très grave puisqu’on comprend le principal. Reste que c’est un roman qui demandera toute votre attention au risque de vous perdre en chemin. La fin est belle et puissante, touchante dans son évidence. Bref, c’est une lecture que j’ai beaucoup appréciée, bien qu’elle ait failli me rendre chèvre…

Pour info :
éditions Le Belial (2023), trad. de Pierre-Paul Durastanti, 384 pages

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Hunger Games : Lever de soleil sur la moisson (Suzanne Collins)

Amis du jour, bonjour !

Comme d’habitude, je lis les romans à leur sortie, et puis la flemme, la vie, je ne chronique pas. En plus, c’est un préquel, à une série que j’ai déjà chroniquée. Mais c’est Hunger Games, l’une des meilleures dystopies pour adolescents que je connaisse, l’une des seules que je relis aussi. Alors on se retrousse les manches et on arrête de procrastiner.

Le Pitch :
Les Hunger Games font partie du paysage de Panem, depuis le soulèvement des Districts il y a 50 ans. Chaque année, vingt-quatre gosses, un garçon et une fille de chaque District, sont envoyés s’entretuer dans une arène savamment étudiée pour le grand spectacle. Mais, là, ce sont les 50 ans des Jeux, et il faut marquer le coup. Pour ces Jeux de l’Expiation, la mise est doublée, et ce sont quarante-huit enfants que l’on envoie mourir. Le jeune Haymitch fait avec. Il est amoureux et compte bien rester sous les radars du Capitole. Ma la révolte gronde, et par de malencontreuses circonstances, c’est lui que l’on envoie dans l’arène…

Mon avis :
Depuis que j’ai lu La Ballade du serpent et de l’oiseau chanteur, j’ai très peur de ce que peut nous réserver un nouvel opus dans l’univers des Hunger Games. Mais là, ce n’est pas Snow (dont je me contre-fiche même quand on essaie de complexifier son origine story), c’est Haymitch. Et Haymitch a beau être un ivrogne antipathique, on l’aime parce qu’il évolue tout au long de la saga, et se révèle touchant et protecteur, stratège aussi. C’est un sacré morceau !

J’ouvre donc le roman, les mains tremblantes, effrayée de trouver ce nouveau volet fadasse comme l’avait été le précédent. Et puis non. J’ai clairement retrouvé ce qui faisait le sel de la trilogie originale. Un début somme toute lent, une peinture presque pastorale de la vie dans le district. Difficile, entachée de deuils, de violence et de peur, coulée dans la lenteur d’un quotidien que rien ou presque ne perturbe, mais immobile, entourée de ces champs au-delà des barrières… Et puis les Jeux, et puis Lenore Dove, et puis la colère, l’injustice. Et tout explose. De District dont personne de ne soucie, le 12 devient symbole de ralliement. Entre déshumanisation des tributs et manipulations abjectes de Snow, Haymitch ne se retient qu’à son seul but : dessiner sa propre affiche, ne pas mourir pour le simple divertissement, rester un homme libre.

Si l’arène est encore une fois presque reléguée au second plan, sa conception est spectaculaire, et relève de l’horreur pure d’un esprit sadique. Ici, on se concentre sur la prise de conscience d’un Haymitch qui sait qu’il va mourir (bon, toi lecteur, tu sais que non, mais même toi, ça te paraît mal barré). Et ça n’enlève rien à la tension, parce que pour qu’il devienne cette loque shootée à l’alcool de contrebande, faut bien qu’il se soit passé un truc super grave (oui, les Jeux c’est déjà très grave en soi). Donc, tension : OK.

Et le fan service alors ? Il est bien mieux casé que dans le précédent opus. Haymitch ayant un lien direct avec Katniss, on croise deux ou trois éléments qui nous font un clin d’œil en passant, et c’est très très chouette ! On retrouve des personnages que l’on adore, on comprend les liens qu’ils entretiennent. Bien entendu, on revient sur deux-trois trucs de La Ballade, mais même sans l’avoir lu, tu comprends en vrai. Tu passeras peut-être à côté de quelques refs (genre pourquoi Snow semble connaître si bien le Disctrict 12, ou le rapport aux Coveys). Mais sincèrement, ça passe crème.

Tout ce blabla pour te dire que j’ai terminé en larmes, en PLS, et que l’épilogue est juste parfait. J’ai retrouvé la Suzanne Collins que j’aimais. Pas celle dont je pensais qu’elle tentait de me décrire un immonde bâtard comme un personnage complexe (non, là je comprends très bien que Snow a toujours été un incroyable sadique qui a juste failli avoir un sursaut de conscience). Non. Celle qui me faisait bouffer mes cuticules, et frôler l’arrêt cardiaque. C’est ainsi que Lever de soleil entre dans mon top 3 de la série…

Pour info :
éditions PKJ, trad. de Guillaume Fournier, 480 pages

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La Saga des Mystères : pentalogie (Jeff Wheeler)

Amis du jour, bonjour !

Décidément, cette année aura été chez moi celle des éditions Rivka, puisque j’ai commencé et terminé, non pas une, mais 2 séries de leur catalogue. La première, la quadrilogie Le Lys de feu, avait été un franc succès. Voyons ce qu’il en est des cinq tomes de La Saga des Mystères.

Le pitch :
Cettie et Séra vivent une vie bien différente. Tandis que la première, orpheline, enchaîne les familles d’accueil peu scrupuleuses et vit dans la misère et la pauvreté, terrifiée par des fantômes qu’elle semble être la seule à voir, la seconde, petite-fille de l’Empereur, profite du luxe de son palais flottant, ne rêvant que de découvrir le monde. Mais leur vie est sur le point de changer lorsque le fortuné vice-amiral Fitzroy recueille Cettie à Saules de Brume, et qu’il se murmure que l’Empereur pourrait choisir Séra, et non son propre fils, comme héritière…

Mon avis :
J’enchaîne rarement les tomes d’une série, surtout en audio. Je préfère diversifier les ambiances, les styles, et ne pas m’enfermer dans un type de narration ou de récit, au risque d’avoir du mal à en sortir. Ici, bien que sachant qu’il s’agissait d’une pentalogie, je n’ai pu m’empêcher de dépenser crédit après crédit pour continuer. Mais quelle petite perle a trouvée Rivka !

En dehors d’un monde construit, aux règles mystiques mystérieuses qui seront en partie révélées tout au long des cinq tomes, c’est une histoire qui fait la part belle à ses personnages. Attachants, effrayants, repoussants, rarement immaculés, souvent nuancés, ils ouvrent un dialogue autour des croyances et de la paix, des secrets des puissants et des intrigues de cour.

Au milieu de ce maelstrom d’idées et de péripéties gravitent deux jeunes filles courageuses, qui subissent échec, humiliations et trahisons, et dont les victoires ne sont que plus éclatantes. Je n’ai honnêtement pas eu besoin de posing (oui, tu sais, la super nana qui se tient au bord de la falaise, cheveux au vent, les yeux vissés sur l’horizon) ou de punchlines à 3 francs pour me dire « eh bah elle en jette vachement quand même ! » On n’a pas eu besoin de me hurler à la figure « t’as vu mon personnage féminin hyper badass ? » C’était donc une leçon du « ne le dis pas, montre-le » dont je suis si friande et qui devrait, selon moi, être la base de tout bon roman.

Et si je dois avouer que sur le dernier tome, j’ai eu une grosse impression de sermon religieux (rien de rédhibitoire, c’était plutôt tourné vers le courage, la foi et la tolérance hein), je ressors de ces 5 romans avec l’impression d’avoir vécu une aventure pleine de sens, dont les personnages ont effectué un réel cheminement à travers la peur, la douleur et le deuil. Des héros aux multiples facette capables d’amour, de compassion et de rédemption, mais aussi de haine et de trahison. Une série dont je vous recommande la lecture, donc, à partir de 13 ans (et jusqu’à 147 ans). Petit plus : ils sont magnifiquement reliés et coûtent tous moins de 20€.

Pour info :
éditions Rivka (pour les 3 tomes sortis actuellement), traduits par Ariane Maksioutine, 18€
Saules de Brumes, 448 pages
Porte Miroir, 416 pages
Ciel d’orage, 432 pages

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Gwendy et la boîte à boutons (Stephen King/Richard Chizmar)

Amis du jour, bonjour !

Dans l’un de mes billets je faisais mention du challenge « Automne du King » et de la liste de lectures que m’avait concoctée mon amie Laura. C’est de cette même liste qu’est issue la lecture d’aujourd’hui.

Sarakontkoi ?
Gwendy est une enfant rondouillette qui expérimente, depuis sa récente entrée au collège, la cruauté de ses camarades. Un jour, elle croise au parc un homme chapeauté qui lui offre une boîte ornée de plusieurs boutons et leviers. L’un d’entre eux lui donne un chocolat par jour, qui miraculeusement fait que tout dans sa vie s’améliore, l’autre lui donne une pièce en argent d’une grande valeur. Quand aux autres boutons, mieux vaut ne pas trop les actionner…

Tenpenskoi ?
Comme pour Elévation, on retrouve ici ce que King sait faire le mieux : lâcher une petite grenade surnaturelle au milieu d’une vi(ll)e bien rangée. Gwendy est une petite fille gentille, attachante, intelligente et en tant que lectrice, je n’ai pu qu’avoir peur de l’impact qu’aurait un tel objet sur elle. Parce que le pouvoir avilit souvent les adultes, et que le bonheur et la facilité ne réussissent pas à tout le monde. L’apparition de cette boîte magique émerveille puis effraie Gwendy ; ce qui est intéressant, c’est de suivre l’évolution de sa mentalité face à ce qui lui est offert, ses peurs, ses espoirs.

Encore une fois, je suis soufflée par la capacité de King à infiltrer le quotidien pour y trouver le meilleur comme le pire, à tracer des lignes d’existence pour nous proposer d’en explorer un segment, comme si nous ne faisions que traverser la vie de ses personnages, et qu’ils existaient au-delà de nous et de son œuvre. Bref, je n’ai pas grand chose de plus à dire sur ce très court roman, si ce n’est qu’encore une fois, King m’a donné un bon cours d’efficacité !

Pour info :
éditions Le Livre de Poche (trad. Michel Pagel), 160 pages, 7.70€

Seul un monstre (Vanessa Len)

Ami du jour, bonjour !

Quand je dois me replonger dans mes stories de l’an dernier pour pouvoir parler correctement d’un roman, c’est qu’il a fait petite impression sur moi… Et c’est effectivement le souvenir que j’en avais !

Sarakontkoi ?
Joan, 16 ans, passe l’été chez la famille de sa mère disparue. Pour tuer le temps, passionnée d’histoire, elle travaille dans un musée du coin où elle fait la connaissance du charmant Nick. Tout bascule lorsqu’elle découvre que sa famille a le pouvoir de voyager dans le temps en volant des minutes, des heures, des jours de vie aux humains ; que c’est elle, le monstre de son histoire ; que les chasseurs de monstres menacent toute sa lignée et celles des autres voyageurs du temps… Elle est face à un dilemme : sauver sa famille et devenir à son tour un monstre, ou bien rester humaine et abandonner son clan aux chasseurs.

Tenpenskoi ?
Je ne vais pas mentir, j’ai été très intriguée par ce titre qui promettait une histoire originale dans son sujet et dans ses personnages. Prendre le parti de raconter l’histoire du côté de ceux qui sont censés avoir le rôle d’antagonistes, c’est culotté. Ils sont ceux qui sont un danger pour les humains, et pourtant, on ne peut s’empêcher de trouver cruels et injustes ceux qui les pourchassent. Ça partait très bien. Tu étais à ça, livre, à ça !

Et puis tu m’as étouffée de ton style lourd, rongé de périphrases qui me perdent dans les scènes d’action et créent des répétitions assez pénibles (plus de 40 occurrences pour « la jeune sino-britannique », 61 pour « le jeune Oliver »). Et quand tu as cinq gars qui s’envoient des mandales et qu’un seul personnage peut être désigné par au moins quatre périphrases différentes, tu imagines le gloubiboulga ? Je te le donne en mille petit génie, ça fait 20 pronoms, prénoms et expressions en tout. On dirait une orgie !

Pompon sur la Garonne, j’ai trouvé les personnages insipides, au point que les pires horreurs peuvent leur tomber dessus (et c’est le cas, on assiste littéralement à une scène de massacre), je m’en tamponne les oreilles avec une babouche grecque, la faute à une construction superficielle qui ne m’a laissé le temps ni de m’attacher aux protagonistes, ni d’être curieuse de leur éventuelle évolution.

Dans l’absolu, j’ai lu pire. Mais sincèrement, un tel roman aurait mérité d’être retravaillé, tant dans sa structure que dans son style. C’est ciao.

Pour info :
éditions Lumen, trad. de Mathilde Tamae-Bouhon, 416 pages, 16€

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Babel : Or The Necessity Of Violence (R.F.Kuang)

Ami du jour, bonjour !

La chronique d’aujourd’hui n’a pas traîné : sitôt terminé, sitôt chroniqué. Ce roman, j’en ai beaucoup entendu parler sur des comptes Instagram que je suis, et j’avoue, en grande amoureuse des dicos et des langues, avoir été piquée par la curiosité. Qui plus est, il était entouré d’une telle aura, presque mystique, qu’il fallait bien que je voie de quoi il retourne…

Sarakontkoi ?
Robin, jeune sino-britannique, est sauvé de la maladie et arraché à sa Chine natale par un universitaire anglais taiseux mais curieusement familier. A Londres, il est éduqué comme un jeune homme de bonne société, et forcé d’étudier les langues mortes et vivantes. Il intègre ensuite Babel, le prestigieux institut des langues et de la traduction de l’université d’Oxford. Babel, dont la renommée est fondée sur l’utilisation d’une magie secrète utilisant le sens perdu entre un mot et sa traduction, gravés sur des barres en argent. Robin doit rapidement faire un choix : servir les puissants de ce monde dans l’ombre, ou bien se battre contre la domination mortelle de l’Empire britannique aux côtés d’une organisation secrète du nom de Hermès… ?

Tenpenskoi ?
La vache, tu ne peux pas t’en rendre compte, mais j’ai tellement galéré pour écrire ce résumé ! Babel est un récit complexe, un pamphlet contre la domination des cultures (quelles qu’elles soient), une ode à la diversité, un traité anticolonialiste, un cri qui résonne à travers les âges. Ouais, rien que ça !

Le système de magie (peut-on réellement réduire le pouvoir évoqué dans le roman à de la magie ?) est basé sur une réflexion simple et pourtant si évidente : traduire, c’est trahir. Parce qu’une langue est bien plus qu’un paquet de mots, de règles orthographiques et grammaticales. Une langue est une culture. Vouloir transposer un texte, un mot, dans une langue qui n’est pas la sienne nécessite de la part de son traducteur une connaissance infaillible de la culture d’origine et du destinataire de ladite traduction. Faut-il alors mettre un texte à la portée de celui qui le reçoit ? Ou bien le forcer à voir le texte à travers les yeux d’une autre culture ? Bref, tout un tas de pistes que j’ai trouvées fascinantes.

Fort heureusement, au vu de la complexité des idées exposées (bien que le roman soit très abordable), le nombre de personnages y est limité. Là où R.F. Kuang aurait pu se contenter d’une simple dichotomie du Bien contre le Mal, elle teinte les combats les plus nobles de motivations personnelles, de colère, de violence. Se pose la question universelle : peut-on changer le monde dans la paix ? Peut-on se battre pour des idéaux sans (faire) souffrir ? Mais lorsqu’enfin le dénouement se profile, on comprend que le monde écrit sa propre tragédie, à l’encre de ses souffrances, de ses croyances aveugles, sourd au réel sens du mot « traduction ».

Bref, un roman très fort, dont je regrette de voir la traduction atterrir chez un éditeur connu pour la piètre qualité de son travail sur les textes étrangers… Si tu lis l’anglais, vas-y, c’est accessible, et c’est ouf !

Pour info :
éditions Harper Voyager, 560 pages, 20.29€

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Sang-de-Lune (Charlotte Bousquet)

Ami du jour, bonjour !

Il m’est venu, il y a quelques temps, comme une envie de Charlotte Bousquet. Ma cagnotte Vinted était chargée à bloc, et je me suis dit « mais quel mal y aurait-il à me prendre quelques occas’ qui me font bien envie ? » Je me suis donc retrouvée avec Des œillets pour Antigone, Là où tombent les anges, et le fameux Sang-de-Lune, que je vous présente aujourd’hui.

Sarakontkoi ?
Dans la cité souterraine d’Alta, les Fils du Soleil (les hommes) règnent en maîtres. Les Sang-de-Lune (les femmes) du fait de leur impureté et des ténèbres qu’elles portent en elles, sont reléguées au rang d’épouses, parfois d’esclaves dans leur propre maison. Gia apprend qu’elle a été promise à un homme violent et qu’elle devra bientôt quitter sa petite sœur. C’est pour la sauver d’un avenir sombre qu’elle décide de s’enfuir avec elle dans les tréfonds de la cité, vers les sauvages, les peuples libres, et les monstres qui rampent dans le noir…

Tenpenskoi ?
La quatrième de couverture fait état d’un roman lunaire, de ténèbres et de chimères. C’est tout à fait ça. Personnellement, je m’attendais à quelque chose de plus criant, de plus nerveux. Mais Gia est un personnage endoctriné qui doit se battre contre elle-même pour accepter la vérité : on lui a menti sur ce qu’elle est, sur le fondement même de la société dans laquelle elle évolue. Elle étouffe ses élans de révolte sous des couches de culpabilité. Coupable pour des crimes que ni elle, ni les autres femmes n’ont commis. Si nous, lecteurs, avons le recul nécessaire pour nous en apercevoir, ce n’est pas le cas de ces femmes dociles sous les assauts de leurs époux, cruelles les unes envers les autres, dévorées de ténèbres qui n’existent que dans leur imagination.

De fait, je lis un roman en demi-teinte. Le poing frappe moins fort que ce à quoi je m’attendais, la course est plus lente. Et pourtant chaque ligne fait douloureusement échos, sous couvert de littérature imaginaire au trait grossi, à la place qu’a longtemps occupée la femme (et qu’elle occupe encore dans certaines cultures). Un être vil, malfaisant, qui doit être maté, étouffé, mutilé. La punition par lapidation pour des fautes qui n’en sont pas, pour l’expiation d’un péché causé par la maltraitance des hommes est insupportable, et Charlotte Bousquet ne nous épargne rien. Ni la mort, ni la cruauté, ni les trahisons. C’est un roman court, lent et parfois presque léthargique, qui figure un éveil progressif et douloureux, jusqu’à une révélation inattendue qu’on aurait voulue libératrice mais qui laisse un goût amer dans la bouche… Ce que j’en ai pensé ? C’était intéressant, dérangeant, et j’ai eu comme un goût de pas assez, mais j’ai conscience que le développement d’une intrigue aurait gâché le propos…

Pour info :
éditions Gulf Stream, collection Electrogène, 320 pages, 17€

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Les enfants d’Aliel, T1 : Le Grand Éveil (Sara Schneider)

Ami du jour, bonjour !

Une fois n’est pas coutume, je vous parle d’un auto-édité (ou presque), que j’ai lu parce qu’il a été vendu et revendu par Alexis de la chaîne Links Off. Je vous ai déjà dit que les auto-édités, c’est pas mon truc, mais VRAIMENT pas. Il faut bien une exception qui confirme la règle…

Sarakontkoi ?
Alors qu’un étrange mal semble empoisonner la terre et les esprits, Lilas découvre qu’elle est une enfant d’Aliel, une déesse ancestrale qui lui a transmis une partie de ses pouvoirs. Elle part avec son petit frère, en compagnie de Flynn, un chat télépathe et son gardien, à la recherche d’autres enfants d’Aliel, afin de combattre Orga avant que le Mal ne contamine tout le vivant…

Tenpenskoi ?
Sara Schneider construit un univers riche d’histoires et de coutumes. Le format de la quête fonctionne, parce qu’elle embarque son lecteur ; d’histoires en aventures, on apprend à s’attacher à Lilas, et à ceux qui gravitent autour d’elle. J’ai aimé qu’ils aient tous une part d’ombre, donc un terrain potentiellement fertile pour qu’Orga y plante les graines de sa haine. J’ai aimé qu’ils n’agissent pas tous en héros, que certains préfèrent continuer d’agir autour d’eux que de partir en quête du Mal absolu. Et puis il y a cette magie de la terre, de la nature qui nous donne juste envie d’aller nous promener en forêt.

Si le style est étonnamment plaisant et travaillé, j’ai tout de même relevé quelques lourdeurs, quelques redondances dont j’ai parlé à Sara, qui m’a confirmé qu’elle avait travaillé différemment sur les tomes suivants (que j’ai et que je compte bien lire). J’ai également noté quelques maladresse dans la description physique des personnages dont il est beaucoup question. Nous sommes tombées d’accord pour dire qu’il s’agissait probablement d’une différence générationnelle dans la représentation du corps, notamment féminin.

Je vous invite grandement, si vous êtes curieux et que vous aimez la fantasy, à vous pencher sur cette série, dont le dernier tome est sorti il y a peu (c’est une pentalogie). Si ce premier tome présente quelques maladresses, il est le balbutiement de ce qui promet d’être une série épique…

Pour info :
éditions Le Chien qui pense, 374 pages, 21€

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Les Douze d’Aritsar, T1 : La Vengeance de la Dame (Jordan Ifueko)

Ami du jour, bonjour !

Il est temps aujourd’hui de sortir un peu des sentiers battus, de ces romans vus et revus. Réjouissons-nous que les SP arrivent parfois à l’improviste… dernièrement, c’était plutôt pour le pire. Là, c’est pour le meilleur.

Sarakontkoi ?
Tarisaï est la fille de la Dame, une femme froide et énigmatique qu’elle ne voit que rarement. Elle vit à l’abri du monde extérieur dans une maison au milieu des steppes verdoyantes de Swana, où elle reçoit la meilleure éducation. Puis elle est envoyée à la capitale de l’empire d’Aritsar afin d’être sélectionnée pour faire partie du Conseil du futur empereur. Une fois consacrée par le Rayon, une puissante magie qui l’unira à l’empereur et aux onze autres membres du Conseil, le vœu que la Dame a formulé est que Tarisaï tue le prince héritier. Mais comment tuer celui qu’on a juré de protéger ?

Tenpenskoi ?
Voilà un moment que je n’avais pas été aussi agréablement surprise, pour ne pas dire déstabilisée, par un roman de fantasy ! Tu découvres, dès les premières lignes, un univers riche et profond dont les parfums exotiques chatouillent tes sens de lecteur. Un brin exigeant sur le début — parce que nous avons très peu l’habitude de ce genre de fantasy, il faut le dire — le roman pose les bases d’un univers cohérent (et c’est plus que bien des lectures que j’ai faites dernièrement) et profond, gouverné par d’anciens mythes, croyances, et autres malédictions. On évite cependant l’écueil de la prophétie (dieu merci) et du personnage tout puissant pour nous dessiner, en négatif, le portrait d’une jeune fille intelligente, forte, mais effrayée et en constante demande d’amour et d’approbation. Un personnage qui, entre la première et la dernière page, aura entamé une impressionnante transformation, jusqu’à se retourner contre son essence même.

Au-delà des personnages, réels porteurs de sens, je salue la fluidité de la plume qui, sans s’encombrer de jolies fanfreluches, parvient à nous transporter dans son esquif sur la rivière paisible de son récit. J’arrête ici les métaphores ampoulées pour clarifier mon propos : je l’ai déjà écrit, j’aime les auteurs qui savent raconter des histoires, ceux qui se mettent en retrait pour mettre leur plume non au service de leur propre personne, mais à celui de leur récit. C’est simple dans la forme pour donner au fond tout le pouvoir d’envoûter son lecteur. De fait, tout le roman a presque une portée de conte, de fable, qui nous enseigne… Et bien entendu, cerise sur la Garonne, les sujets de l’émancipation, de la réalisation, du dépassement de son image, sont au centre du roman. Le tout magnifiquement traduit par Anne Delcourt, dont je salue le travail. C’est bien la première fois que je ne fronce pas le nez sur une épreuve non corrigée, parce que les seuls erreurs que j’y ai rencontrées sont de petites coquilles. Je n’ai pas râlé sur le style, sur des platitudes, ni sur des erreurs de registre ou de vocabulaire. Que du bon donc, que je vous recommande vivement !

Pour info :
éditions Nathan, trad. de Anne Delcourt, 464 pages, 19.99€

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Les Sœurs Hollow (Krystal Sutherland)

Ami du jour, bonjour !

Tu le sais si tu me suis depuis quelques temps maintenant, les récits gores ou horrifiques, très peu pour moi. Ceci dit, quand je vois passer partout un roman qui à la base m’intriguait, je ne résiste pas. Et puis, le cracra-grrrr-grrr, ça fait moins d’effet à l’écrit, non ?

Sarakontkoi ?
Grey, Vivi et Iris Hollow ont disparu en pleine rue lorsqu’elles étaient très jeunes, et sont réapparues un mois plus tard, complètement nues. De ces quelques semaines, elles ne gardent aucun souvenir, mais une trace en forme de lune au creux du cou. Lorsque, des années plus tard, Grey disparaît de nouveau, Vivi et Iris partent à sa recherche et doivent, pour cela, replonger dans les recoins sombres de leur passé. Dans cette course contre la montre, semée de mort, de pourriture, il leur faudra éviter l’homme au crâne de taureau qui semble les pourchasser…

Tenpenskoi ?
Clairement, c’est un roman qui se lit en deux temps. La première moitié du roman est lente, et j’avoue ne pas avoir vraiment compris où j’allais. Beaucoup de mystères, de phrases à demi-mots, de confidences, de rancœurs. C’est simple, j’avais l’impression de débarquer en plein milieu d’une soirée. Jentre dans la pièce, tout le monde s’arrête de parler, et les chuchotements reprennent. Le malaise quoi. La lecture n’était pas désagréable, mais je n’étais pas dans mon assiette. Et puis j’ai compris que les révélations viendraient en temps voulu, et j’ai lâché un peu la bride.

La seconde partie, en revanche, est une fuite en avant. D’étrange on passe parfois à clairement dégueulasse, pour arriver à « ouh la la, mais qu’est-ce que je fais là ? » On retrace avec ces trois frangines irrésistiblement flippantes un passé oublié, un secret inavouable. Ca patauge, ça grouille, ça pourrit, et ça fonctionne… même si quelques éléments restent très obscures, même quand on referme le livre. Comme les sœurs Hollow, le roman exerce sur son lectorat une sorte de fascination malsaine. En dehors du rythme, l’écriture est très imagée et, pour notre plus grand dégoût, immersive. Stylistiquement, ça fonctionne aussi, tous les feux sont donc au vert. Bref, pas un coup de cœur, mais une lecture bien sympathique qui accompagnera vos soirées d’automne solitaires…

Pour info :
éditions Rageot, traduction de Lilas Nord, 384 pages, 18.50€