Amis du jour, bonjour !
Je vous le dis souvent, il m’est extrêmement difficile de parler d’un livre qui a chamboulé mon univers. Mon esprit, tel un culbuto, oscille entre le besoin viscéral (passez-moi le cliché) de vous en parler, et l’angoisse de ne pas trouver les mots qui vous pousseront immanquablement à vous procurer ce livre. Enfin, tentons tout de même la chose.
Sarakontkoi ?
Dans un récit construit entre un passé qui se dévoile et un présent étouffant, le lecteur découvre la vie singulière d’Elizabeth Zott, chimiste de son état, dans ces années 50-60 qui ne prêtaient guère aux femmes qu’une place dans leur cuisine. D’injustices en victoires insignifiantes, Elizabeth parvient pourtant, à travers l’émission de cuisine dans laquelle elle a été catapultée, à enseigner aux femmes quelques notions de chimie, mais aussi l’étincelle de la rébellion.
Tenpenskoi ?
Dieu que ce résumé me paraît pauvre en comparaison du chef-d’œuvre que j’ai lu ! Je l’ai dit sur Instagram lorsque j’ai terminé ma lecture, je suis persuadée que ce roman peut changer des vies. Beaucoup de lecteurices à qui je le conseille me demandent s’il s’agit d’une histoire vraie. Je réponds « non », mais j’ai envie de dire qu’Elizabeth Zott a vécu en Katherine Goble, en Joan Clarke, en Marie Curie, en toutes ces femmes qui se sont un jour entendu dire où est leur place, ce à quoi elles doivent ressembler, ce qu’il convient ou pas de dire… En plus donc de me parler en tant que femme, Leçons de chimie (paru en grand format sous le titre La Brillante destinée d’Elizabeth Zott) est une leçon d’écriture à bien des égards.
Premièrement, les personnages. Bien que le roman soit majoritairement écrit du point de vue d’Elizabeth, il donne une voix à beaucoup d’autres, aux antagonistes comme aux adjuvants. Certains partis pris sont surprenants, et pourtant… que serait ce récit sans le chien Six-Trente, la toute jeune Mad, l’infâme directeur de laboratoire ? Les femmes se trahissent puis se comprennent, les hommes sont démunis mais accompagnent. Rien n’est blanc, rien n’est noir. Et ce casting nous sert un délicieux melting pot d’interactions tantôt inspirantes, tantôt révoltantes.
Ensuite, comment ne pas parler du style ? Factuel et neutre, laissant les lecteurices s’indigner ou s’attendrir, dessinant des sourires de connivence sur les lèvres de ceux qui sauront lire l’ironie d’une histoire qui s’écrit sans que sa protagoniste en soit vraiment consciente. J’ai eu dans le regard, grâce à la plume de Bonnie Garmus, la tendresse d’une mère qui regarde son enfant inconscient faire son chemin dans la vie, tantôt inquiète, tantôt fière.
Enfin, au-delà du style, Elizabeth Zott est un parangon de résilience. Tout ce qui peut arriver de pire à une jeune femme dans sa situation… eh bien tout arrive. La loi de Murphy les amis. Mais, froide et directe, peu encline à se laisser aller, Elizabeth continue d’avancer. On ne s’appesantit pas sur les non-dits, les drames, les injustices. Ça ne veut pas dire que rien n’a d’importance. Simplement qu’elle n’a pas le choix. Et lorsque ses forces l’abandonnent, ce sont tous ces merveilleux personnages qui la portent jusqu’au crépuscule de ses journées.
Je n’ai plus de mots pour tenter de vous convaincre de lire ce roman. Je vous laisse donc maîtres de votre décision. Mais moi, si j’étais vous, je le lirais.
Pour info :
éditions Pocket (trad. de Christelle Gaillard-Paris), 544 pages, 9.50€

