Publié dans Bouquinade, Roman

Today, tonight, tomorrow (Rachel Lynn Solomon)

Ami du jour, bonjour !

L’année commence bien, même si j’aurais préféré entamer 2022 avec une bonne lecture. D’ailleurs, ne pense pas que je suis à jour dans mes billets parce que je te parle de la lecture que je viens de terminer ; simplement, ce roman sortira aussi vite de ma tête qu’il est entré dans ma bibliothèque, donc je t’en parle rapidement, avant d’oublier. Tu l’auras compris, je ne suis guère convaincue par cette romance ado…

Sarakontkoi ?
Dernier jour de lycée pour Rowan, qui marque aussi la fin de sa rivalité avec son plus grand adversaire : Neil McNair, toujours premier lorsqu’elle est seconde, toujours sur ses talons lorsqu’elle arrive en tête. En dehors de ses études, Rowan a un intérêt : la littérature sentimentale, intérêt dont ses proches se moquent gentiment. Ce soir, c’est la dédicace de l’autrice favorite de Rowan, mais c’est aussi la Traque, jeu de piste géant organisé pour les Séniors par les 3e année. Ce soir, Rowan devra jongler avec ses amies, un Niel McNair pas si agaçant, et une passion dont elle a honte. Et si cette nuit était la clé pour tout changer ?

Tenpenskoi ?
Je suis un peu triste de te dire ce que j’ai réellement pensé de ce roman. Parce qu’il est bourré de bonnes intentions ! D’ailleurs, commençons par là : l’autrice aborde des thèmes tels que la libération de la sexualité chez les adolescentes et l’inexpérience d’un jeune homme face à une jeune femme expérimentée, le dialogue autour des envies sexuelles dans un couple adolescent, les préjugés face à une communauté donnée (ici, la communauté juive). Et tout ça, c’est vraiment cool !

Mais c’est fait avec une telle maladresse… et j’en suis la première désolée. Les solutions sont téléphonées aux protagonistes de manière peu subtiles. Tu cherches une réponse à une énigme ? Bah justement, t’appelles ta mère pour tout autre chose et elle te raconte une anecdote pleine de nostalgie qui n’a rien à voir avec le schmilblick et qui contient la réponse. Les dialogues manquent cruellement de naturel. Et puis alors ce troisième acte (tu sais, celui où les n’amoureux ils sont plus si z’amoureux parce qu’il y en a un qui comprend un truc de travers)… Là, j’ai pas compris. J’ai eu envie de frapper Rowan. Cette colère n’avait aucun sens, ça sortait de nulle part. Ca servait juste l’intrigue, et dans ces quelques paragraphes, je ne lisais que : « scénario scénario scénario, scénario scénario, scénario ! »

Parlons de la passion de Rowan pour la littérature sentimentale. Elle en fait des caisses, des montagnes même ! Et vas-y que « la littérature sentimentale est un genre écrit pour les femmes qui se penche sur leurs envies et qui elles sont vraiment », ou encore c’est « le seul genre où les relations entre les personnages sont au centre de l’action », et je te passe les scènes d’aveux à ses proches, genre « bonjour, je m’appelle Rowan Roth, j’aime la littérature sentimentale, accepte-le ». À un moment, j’ai eu envie de hurler « Rowan, c’est pas un coming out ma fille, remets-t’en ». Ce roman n’est pas une purge, loin de là. Mais il manque de style et de subtilité. Ma note : dommage/20. J’en ai un autre de la collection, on verra bien ce que ça donne.

Pour info :
éditions Milan (trad. de l’anglais par Leslie Damant-Jeandel), 416 pages, 16.90€

Publié dans Bouquinade, Roman

Là où chantent les écrevisses (Delia Owens)

Ami du jour, bonjour !

Tentons de nous mettre à jour dans nos retour de lecture… surtout moi ! Et pour le coup, cette lecture (cette écoute pour être exacte) a attendu dans mes tiroirs un petit bout de temps, tout de même. Depuis ma merveilleuse lecture de Dans la forêt, je n’avais pas réellement relu de nature writing survivaliste, et celui-ci me faisait de l’œil depuis le rayon littérature de mon collègue. Qu’à cela ne tienne, merci mon abonnement Audible, j’ai sauté sur l’occasion !

Sarakontkoi ?
Successivement abandonnée par sa mère, ses frères et sœurs plus âgés, et enfin par son père alcoolique et violent, la jeune Kya, 10 ans, la « Fille des marais » comme l’appellent les habitant de la Barkley Cove (Caroline du Nord), n’a d’autre choix que de survivre par elle-même. Incollable sur la faune et la flore des marais, elle pêche et cueille, et vend le fruit de son travail en ville. Sa rencontre avec le jeune Tate, qui voit en elle autre chose que la sauvageonne analphabète, bouleverse sa vie… Lorsqu’une quinzaine d’années plus tard, un corps est retrouvé dans la boue du marais, c’est forcément sur elle que portent les soupçons.

Tenpenskoi ?
Un récit initiatique survivaliste ? Il n’en fallait pas plus pour m’intriguer, m’appeler, m’obséder, et pour finalement me faire craquer. Et j’en ai eu pour mon argent. Le roman a deux temporalités : une première, fin des années 70, où le corps du beau gosse, star locale, est retrouvé dans le marais, et où le lecteur suit l’enquête du shérif. Et la seconde dans les années 60, qui s’étend sur une dizaine d’années, où l’on voit Kya survivre, s’instruire, grandir dans une solitude quasi totale. Les connaissances qu’elle acquiert et emmagasine te donnent juste envie de dévorer des bouquins sur le biotope du marais. Kya y met un tel amour, une telle passion, surtout chez une gamine qui part de rien, c’est juste une pure merveille.

Le style de Delia Owens se fait tantôt poétique, presque lyrique, lorsque Kya observe la nature autour d’elle, et plus directe et factuel lorsqu’il s’agit d’humains, comme si Kya ne pouvait voir en ses semblables la beauté qu’elle observe dans son marais. Si le récit de l’enquête puis le procès — dont les passages s’intercalent avec l’enfance et l’adolescence de Kya — restent très anecdotique, l’évolution de la jeune femme qu’elle devient est fascinante. J’ai avalé ce roman comme on déguste un met étranger : avec un peu de méfiance au début, puis une gourmandise inattendue. J’ai particulièrement aimé la fin, que j’ai trouvée touchante à sa manière. Beaucoup m’ont demandé si je l’avais lu parce que Reese Witherspoon en avait parlé pour son club de lecture et avait adoré. Que nenni, je n’avais rien entendu à son sujet avant de l’ouvrir. Bref, une lecture que je recommanderai aux curieux, aux amoureux de nature writing et aux amateurs de chemin de vie.

Pour info :
éditions Points (traduit de l’anglais par Marc Amfreville), 480 pages, 8.50€

Publié dans Bouquinade, Roman

Je ne meurs pas avec toi ce soir (Gilly Segal / Kimberly Jones)

Ami du jour, bonjour !

Une fois n’est pas coutume, je me plonge dans une lecture qui suit l’actu, si si. Parce que j’ai cessé de regarder / lire les actus, sous toutes leurs formes. En l’occurence, si j’ai eu envie de lire ce roman, c’est pas pur hasard, parce qu’il m’a intriguée. Et mon instinct ne s’est pas trompé.

Sarakontkoi ?
Lorsqu’une émeute éclate lors d’un match de foot inter-lycée, suite à une remarque raciste d’un gamin blanc, Campbell et Lena n’ont d’autre choix que de fuir ensemble. Campbell est blanche Lena est noire et toutes deux ont de gros a priori sur l’autre : Lena confond « blanc » et « riche » et Campbell fait l’amalgame entre « noir » et « dealer ». Lena n’a qu’une idée en tête : rejoindre son petit ami, même s’il faut pour cela traverser les manifestations spontanées qui se sont propagées dans le quartier. Plongées au cœur de l’enfer des émeutes, sauront-elles mettre de côté leurs préjugés ?

Tenpenskoi ?
Franchement, le sujet avait de quoi être casse-gueule, surtout en ce moment ; cela dit, l’intelligence de ce roman tient à son écriture à quatre mains, celles d’une autrice noire et d’une autrice blanche. Et les deux points de vue sont importants pour que le lecteur, quelle que soit sa couleur de peau, se sente inclus et impliqué. Lena est une jeune fille populaire, mais effrayée à l’idée de croiser un jour une patrouille de police, parce qu’elle sait que sa couleur de peau fera d’elle une suspecte systématique, quoi qu’il arrive. Campbell est blanche, donc elle ne connaît pas cette peur, mais elle connaît de graves problèmes financiers et familiaux.

Ce que j’ai aimé, c’est que le roman traite certes un sujet d’actualité, en mettant le doigt notamment sur le « racisme ordinaire », celui dont on ne se rend pas forcément compte. Mais il prend en compte les individualités de chacune de ses deux protagonistes. Aucun de leurs jugements n’est rabaissé ou critiqué. Les autrices se contentent de mettre le doigt dessus, et c’est au lecteur de faire son propre chemin, d’avoir ses propres prises de conscience. Le récit est très immersif, ce qui ne gâche rien. Et surtout, il n’en fait pas des tonnes.

Bref, ce fut une lecture instructive. Je ne saurais que le recommander à tout lecteur intéressé par le sujet.

Pour info :
éditions Milan, 248 pages, 14.90€