Publié dans Bouquinade, Roman historique

L’Apprentie Cartomancienne (Aurélie Croizé)

Amis du jour, bonjour !

Il est temps pour moi de vous parler d’un roman qui me tient à cœur puisque j’ai eu le privilège de faire partie des bêta-lectrices de son autrice avant présentation aux éditeurs (et que j’ai donc connu ses personnages cloués au pilori de leur passion). C’était une merveilleuse rencontre, et un très chouette projet, que je m’en vais vous présenter sans délai !

Sarakontkoi ?
Dans le Paris napoléonien, la jeune Louise vit seule dans les rues, elle est diseuse de bonne aventure, pas qu’elle soit voyante, mais elle sait très bien observer. Lorsque Marie- Anne Lenormand la repère, elle la prend sous son aile. Tandis que sa mentore est arrêtée pour trahison, Louise doit utiliser ses cartes pour aider l’inspecteur Brandicourt à élucider un étrange meurtre.

Tenpenskoi ?
Mais que voilà un récit intelligent, bien écrit, amoureux de son sujet, porté par la plume humble et légère de son autrice ! Et je ne dis pas ça parce qu’elle m’est chère… vous connaissez ma réticence à lire des romans auto-édités ou avant édition ; eh bien ceux d’Aurélie, je les lis. Et je les aime. Parce que derrière la plume maîtrisée, il y a cette femme modeste et avide de savoir et de partage. Le souci apporté aux détails historiques est tel qu’elle fait souvent appel, dans ses projets à des professionnels (historiens, psychologues, etc.). Et ça, c’est un premier argument de choc.

J’ai aimé visiter la cour de Joséphine, les bas-fonds parisiens et les tripots, l’univers de la divination, que je connais très peu, et je découvre dans le roman édité des notes de bas de page sur le contexte historique et la culture à cette époque, sur les cartes, et même quelques doses d’humour ! Louise est douce, patiente intelligente, et j’aime beaucoup la relation de confiance qu’elle établit avec Brandicourt. La romance est chou (moins sulfureuse que dans les premiers jets, clin d’œil) sans être prédominante. Bref, c’est un roman tout en douceur, qui maîtrise son rythme et son sujet, que du bonheur ! On espère en voir plus (LOL, on va en voir plus), pas forcément dans une suite, mais sur d’autres thématiques, d’autres époques et pourquoi pas d’autres univers…

Pour info :
éditions Gulf Stream, collection Echos, 288 pages, 17€

Publié dans Bouquinade, Policier / Thriller

Jefferson, T1 (Jean-Claude Mourlevat)

Ami du jour, bonjour !

Je dois l’avouer, je prends souvent moins de plaisir à lire des romans pour un plus jeune public. Cela dit, Mourlevat touche les cœurs des jurés des prix de littérature jeunesse, et j’avoue n’avoir lu « que » ses romans pour adolescents. Il était donc temps de réparer cette erreur.

Sarakontkoi ?
Dans un monde où certains animaux peuvent parler, avoir un travail, et aller chez le coiffeur, le jeune hérisson Jefferson mène une vie tranquille. Mais voilà qu’en se rendant chez son coiffeur, il le trouve mort, assassiné, une paire de ciseaux plantée dans la poitrine. Sur un vilain malentendu, on le prend pour le tueur. Sa seule issue : trouver le vrai meurtrier. Et si son enquête le menait chez les humains ?

Tenpenskoi ?
Ma première envie est de répondre : pas grand chose. Ce n’est pas que j’ai trouvé le roman mauvais, c’est que je n’y ai pas trouvé mon compte. Ce qui fait que j’aime Mourlevat. Toujours excellent dans le style et dans cet humour innocent, presque drôle sans le faire exprès, j’ai malgré tout eu bien du mal à m’intéresser à l’enquête.

Elle nous mène pourtant vers une intéressante réflexion sur la condition animale, sur les mouvements militants qui tentent de mettre en lumière ces conditions. Ceci dit, je suis incapable d’expliquer pourquoi le roman ne m’a pas particulièrement touchée. Certains passages se sont révélés diablement efficaces pourtant. Je comprends l’intention, que je trouve louable. Mais j’ai eu l’impression d’être ballottée à droite et à gauche, guidée par des ficelles un peu trop grosses et de voir Jean-Claude Mourlevat faire ce que je ne l’avais jamais vu faire avant : se mettre à hauteur d’enfant. Ça n’enlève rien au sérieux du propos, mais même dans La Rivière à l’envers, la fantaisie n’était jamais infantilisante. Le roman a pourtant reçu de nombreux prix. C’est donc simplement que son charme n’a pas opéré sur moi… Ce qui est loin d’en faire un mauvais roman !

Pour info :
éditions Gallimard Jeunesse, collection Folio Junior, 272 pages, 6.95€

Publié dans Bouquinade, Policier / Thriller

Dix (Marine Carteron)

Ami du jour, bonjour !

Premier billet de l’année, et ça commence bien puisque c’est un livre que je viens de terminer. Si tu me suis sur Instagram, tu sais déjà plus ou moins ce que j’en ai pensé. Sinon… bienvenue dans mes bonnes résolutions !

Sarakontkoi ?
Sept adolescents, venant d’un même lycée, sont invités, encadrés par une prof de français, une ancienne infirmière et un ex-flic, à participer à un escape game littéraire sur une île perdue au large de la Bretagne. Isolés, sans aucun moyen de joindre la côte, ils meurent les uns après les autres, après avoir entendu d’étranges messages… quel sombre secret les lie ?

Tenpenskoi ?
Attention, quand on s’attaque à un pilier — que dis-je ? –, une queen du polar telle que Madame Christie, il faut faire les choses bien ! Le postulat de base a tout pourtant pour insuffler un air de modernité au récit d’Agatha, Ils étaient dix : une télé-réalité, quoi de mieux pour isoler des esprits tourmentés et les faire payer ? Je pars donc dans ma lecture confiante, bien que consciente que personne n’égalera jamais mon autrice de polars favorite. Et je mets de l’eau dans mon vin.

J’ai pris du plaisir à ma lecture, c’est déjà un premier excellent point. Sur les deux derniers tiers du roman, les personnages tombent comme des mouches, et j’avoue que chaque fois que quelqu’un entre dans une pièce, tu t’attends à ce qu’elle se referme et que le personnage meure dans d’affreuses souffrances. C’est généralement ce qui arrive. On ajoute même deux ou trois accès de folie, et on a le parfait cocktail flippant, avec, viscères sur le gâteau, pas mal de descriptions bien frontales et sadiques de morts méritées. En termes de catharsis, on est bien.

Mais il y a un mais. Deux choses m’ont dérangée. D’abord, un certain manque de subtilité. On sait de suite, dès notre rencontre avec ces personnages, qu’ils sont coupables, et mal à l’aise dès le voyage en train. On nous le répète tout le long du roman, les points de vue internes s’enchaînant rapidement, les discours coupables cherchant pourtant l’apaisement sont martelés, et franchement, on a bien compris que tous sont bien pourris. Le second point qui m’a gênée, c’est le final. Là où Agatha punit également son meurtrier (qui se déclare d’ailleurs lui-même coupable et s’inclut dans sa propre sentence), notre marionnettiste ici est extérieur à l’affaire, et a tout orchestré grâce à la magie d’un bon compte en banque et d’une imagination fertile. C’est presque trop facile, et un peu torché en trois pages. D’autant plus que je me suis sentie légèrement trahie. Là où dans le roman d’Agatha Christie, le meurtrier est suffisamment subtil pour ne pas jouer les étonnés, ici, il a l’air tout aussi ignorant que les autres (rappelons-le, le point de vue est interne, donc on est dans la tête des personnages !). Quelques fausses notes donc, qui ne m’auront pas empêchée de passer un bon moment…

Pour info :
éditions du Rouergue, collection DOADO noir, 303 pages, 15.30€

Publié dans BD, Bouquinade

Les Croques (Léa Mazé)

Ami du jour, bonjour !

Causons graphique aujourd’hui, avec une petite trilogie pas piquée des hannetons parue chez un éditeur que je surveille beaucoup en ce moment parce que j’apprécie leur ligne éditoriale ; les éditions de la Gouttière.

Sarakontkoi ?
Les parents de Céline et Colin, les jumeaux terribles, tiennent une entreprise de pompes funèbres ; du coup, ils sont la risée des gamins de l’école, qui les appellent les Croques, sympathique diminutif pour croque-mort. Après une Nième bagarre, les jumeaux sont renvoyés chez eux et consignés à domicile jusqu’à nouvel ordre. Il ne leur reste qu’à jouer dans le cimetière… où ils découvrent d’étranges marques sur certaines sépultures. Ils décident de mener l’enquête. Mais lorsqu’ils font une macabre découverte, personne ne semble disposé à les croire…

Tenpenskoi ?
Une petite merveille. On les aimes ces deux fortes têtes, franchement pas fortiches à l’école, plutôt du genre à avoir toujours une bêtise derrière la tête. C’est d’ailleurs tout le fond du problème : à force de bêtises, leurs parents, épuisés, finissent par ne plus les croire. Le cimetière est un décor inhabituel dans les bandes-dessinées pour enfant et l’aura de mystère qui plane n’en est que plus épaisse. Alors oui, du coup, on a un meurtre. C’est pas sanglant, mais bon, quand même, faut le savoir.

Le dessin est tellement beau ! Léa Mazé a réalisé pour notre plus grand plaisir de magnifiques aquarelles et les a parfaitement mises en cases. La réalisation des planches est tout aussi parlante que le dessin et le scénario. J’ai aimé traverser les grandes planches de silence comme les plus turbulentes. Et non seulement c’est beau et drôle, mais en plus, chacune des BD de la trilogie prend son lectorat très au sérieux. C’est une vraie enquête avec des personnages hauts en couleur. Bref, je ne peux qu’en recommander la lecture. Et encore, je n’ai pas encore parlé du travail de fabrication ! Les couvertures sont superbement ornées d’un titre au fer à dorer et les illustrations sont, encore une fois, à tomber. Bref, un bel exemple de coopération auteur/éditeur (c’est en tout cas l’impression que ça donne) pour une BD récompensée par le prix ACBD.

Pour info :
éditions de la Gouttière
Tome 1 (Tuer le temps) : 72 pages, 13.70€
Tome 2 (Oiseaux de malheur) : 72 pages, 13.70€
Tome 2 (Bouquet final) : 96 pages, 14.70€

Publié dans Bouquinade, Policier / Thriller

La maison biscornue (Agatha Christie)

Amis du jour, bonjour !

Aujourd’hui, un livre tout court que j’ai mis un temps infini à lire. Attention, pas qu’il n’était pas bien ! Mais à ne lire que tard les soirs, on n’avance guère que deux pages par deux pages… celui-ci est une (très vive) recommandation de ma maman qui, depuis quelques temps, dévore les Agatha comme moi un bon saucisson, et c’est pas peu dire !

maison_biscornue

 

Sarakontkoi ?
Milieu du XIXe. Charles rencontre Sophia en Égypte, tombe amoureux et promet de l’épouser lorsqu’il reviendra d’une longue mission au Moyen-Orient, si elle n’a rencontré personne. À son retour en Angleterre, deux ans plus tard, leurs sentiments sont restés inchangés. Mais le grand-père adoré de Sophia vient de mourir de façon très étrange. Sophia ne peut épouser  Charles tant que l’affaire n’est pas résolue, et elle semble persuadée que n’importe lequel des membres de sa famille peut avoir tué le vieil homme…

Tenpenskoi ?
Une enquête sans Poirot ni Marple, mais quelle enquête ! Comme dans Le Meurtre de Roger Ackroyd, le point de vue est singulier mais le lecteur, cette fois-ci, prend pleine part à l’investigation ; sans manquer, comme la police, de se faire traiter d’imbécile et d’incapable par le personnage de la petite Joséphine. Les apparences sont trompeuses, et la facilité un bien mauvais conseiller. Un livre aux multiples rebondissements, jusqu’au final, explosif comme d’habitude. Pour les amoureux d’Agatha, il ne paie pas de mine, mais n’hésitez pas !

Pour info :
Éditions Le Masque, collection Masque Christie, 240 pages, 5,60€ chez votre libraire.

Publié dans Mini-interview

5 questions à : Trevor Shane

Amis du jeudi soir, bonsoir !

Demain est notre dernier jour avant le week-end, le saint vendredi libérateur, annonciateur de grasse-matinée et j’en passe… Une nouvelle mini-interview, des plus enrichissantes puisqu’elle m’a permis d’ouvrir sur Enfants de la paranoïa (chroniqué il y a quelques jours) des yeux nouveaux. Si vous ne l’avez pas encore lu, j’espère que cette petite intrusion dans la tête de l’auteur guidera vos pas vers ce livre-là.

Tout a donc commencé avec ce conseil de Maëlle (pour rappel, c’est elle qui m’a tendu le livre en me conseillant de le lire). Et puis après ma lecture, et suite à ma réaction enthousiaste, elle m’a dit, comme si c’était la chose la plus évidente et la plus naturelle du monde : « bah, écris-lui, je suis certaine que ça lui fera plaisir d’entendre que son travail t’a plu. » Ni une ni deux, je saute sur mon clavier, et me fends d’un mail élogieux. Et figurez-vous que la magie opère ! Quelques jours plus tard, le voici qui me répond (du fin fond de son New Jersey, USA) qu’il sera heureux de se prêter au jeu de la mini interview. Et pour le coup, il n’a pas fait les choses à moitié ! Je laisse donc la parole à Trevor…

1 – Trevor, ma première question, assez bateau, mais elle nous aidera à cerner l’auteur (toi!) : depuis combien de temps écris-tu ? Pourquoi ?

J’ai toujours raconté des histoires, et j’écris depuis que je suis tout petit mais, jusqu’à Enfants de la paranoïa, je ne partageais ces histoires qu’avec mes amis. Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours voulu être écrivain, mais j’ai toujours pensé qu’il était important de vivre et d’expérimenter des choses avant que ce soit possible. Certains auteurs peuvent griffonner des histoires qui trouvent un échos chez les lecteurs avant même d’avoir réellement vécu et « expérimenté ». Je ne suis pas de ceux-là. Et puis j’ai eu 30 ans, et je me suis dit que j’avais vécu une portion assez substantielle de ma vie ; là, l’idée de Enfants de la paranoïa m’a frappé et je me suis dit : « ça y est, j’ai enfin une idée qui vaut le coup d’être partagée avec le monde. »

2 – D’où te vient cette idée d’une guerre secrète – dans laquelle les notions de Bien et le Mal ne sont pas si nettement délimitées ? Essayais-tu de remettre en question ces notions, notre Morale ?

Tout a commencé avec les personnages en fait, ou tout du moins avec Joseph, le personnage principal. Je voulais construire une intrigue autour d’un tueur, tout en amenant les lecteurs à s’identifier à lui. Le seul moyen que j’aie trouvé pour en arriver à ce résultat a été de lui faire croire que ces meurtres étaient justifiés. Cela dit, ce que je voulais éviter à tout prix, c’était une bataille du Bien contre le Mal, donc sans l’ambiguïté morale qui existe dans notre monde. Dans le monde réel – contrairement aux livres tels que Harry Potter ou bien les films tirés de comics (bien que ceux-ci soient très bien aussi) – on trouve rarement des méchants qui se voient en tant que tels. Dans le monde réel, il est rare que quelqu’un se voie autrement que comme le héros.

3 – Pourquoi as-tu choisi de fixer ces trois règles ? Que représent-elles ?

Les règles sont fixées parce que toute guerre a besoin de limites arbitraires. J’ai toujours été fasciné par les règles de la guerre parce qu’elles n’avaient jamais fait sens pour moi, avant. Comment une guerre, qui voit deux parties s’entretuer, peut-elle avoir des règles ? Cependant, en écrivant Enfants de la paranoïa, le but de ces règles m’est apparu. Elles sont faites pour permettre aux participants de ne pas devenir fous, de garder les pieds sur terre. À partir du moment où on ordonne à quelqu’un d’enfreindre le plus basique des commandements humains et de tuer un autre être humain, qu’est-ce qui va l’empêcher de faire n’importe quoi après ? Les guerres ont besoin de règles, pas parce que les règles sont morales, mais parce que sans elles, le monde sombrerait dans le chaos. Bien entendu, dans Enfants de la paranoïa, il y a aussi la question sous-jacente de savoir si les règles ne sont pas simplement là pour perpétuer la guerre elle-même, la garder secrète, et s’assurer qu’il y aura bien des générations dans le futur qui continueront à combattre.

4 – Toi-même, connais-tu les raisons de cette Guerre ? Vas-tu les expliquer dans un autre tome, en expliquer les enjeux ?

Comme tu le sais, Enfants de la paranoïa est écrit comme un journal par un des soldats qui prennent part à cette Guerre (Joseph, ndlr). Par conséquent, les lecteurs ne savent que ce qu’il sait, et ne découvrent que ce qu’il découvre. À un tel niveau personnel, ce qui importe n’est pas comment la Guerre a commencé, mais pourquoi chaque individu continue à se battre. En y regardant bien, dans un grand nombre de conflits dans le monde, il n’est pas rare que les soldats ne connaissent pas le but ultime de la guerre, mais ils peuvent tous te donner une raison pour laquelle eux ont choisi de se battre. En ce qui concerne Joseph et ses amis, ils se battent pour se venger, et parce qu’on leur a dit que c’était pour une noble cause.

Cela dit, au fil de la trilogie, j’espère étancher la soif des lecteurs quant aux origines de ce conflit.

5 – Celle-ci est en lien avec la précédente, mais tu nous laisses sur un cliffhanger (une fin qui n’en est pas vraiment une)… prévoies-tu d’écrire une suite ? De nous raconter le combat de Maria, et de nous dire si cette Guerre peut finir ?

Enfants de la paranoïa est le premier volume d’une trilogie (le second volume sort aux USA en avril, mais je ne connais pas sa date de sortie en France). En ce moment, je suis en train de finaliser la première version du troisième tome. Le deuxième et le troisième volume vont souvent dans une direction attendue par la plupart des lecteurs je pense (ou du moins je l’espère, j’ai tout mis en œuvre pour ça), mais il y a également un bon nombre de surprises tout au long de l’intrigue.

Voilà, à présent, je vous laisse sauter sur Enfants de la paranoïa, qui en vaut franchement la peine ! Merci à Trevor, bien entendu, on se retrouve pour le tome 2 !