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Violette Hurlevent et le jardin sauvage (Paul Martin / Jean-Baptiste Bourgois)

Amis du jour, bonjour !

Il faut savoir qu’en un an de bookclub, mon roman n’a été tiré au sort qu’une seule fois (enfin, une deuxième fois depuis le premier jet de ce billet). Et il a fallu que ce soit cette fois où j’ai trouvé mon roman très moyen. Quand ça veut pas…

Le Pitch :
Violette vient d’emménager dans la très vieille (et très mal entretenue) maison de son grand-père avec sa mère, pour échapper à un père violent. Perdue, triste, elle n’a aucune envie d’habiter dans une maison qui pue le renfermé, ni de courir dans le jardin abandonné qui ressemble à un terrain vague. Mais elle n’est pas au bout de ses surprises, puisque le jardin, lui, n’attendait qu’elle…

Mon avis :
Je n’ai jamais lu Le Jardin secret, de Frances Hodgson Burnett, bien que j’en connaisse plus ou moins l’histoire. En choisissant ce roman, j’étais certaine d’y trouver à peu près ce que j’aurais pu trouver dans le roman de Burnett : un jardin que j’imagine être la métaphore d’une échappée dans l’imaginaire pour soigner les maux d’un monde réel trop difficile à appréhender (oui, genre Le Labyrinthe de Pan aussi). Effectivement, on fait aisément le parallèle entre ce jardin et les événements plus ou moins traumatisants que traverse Violette. C’est bien écrit, les dessins sont mignons. Mais alors quoi ?

Eh bien dans son jardin, Violette, échappe effectivement à sa réalité, ainsi qu’au temps qui s’y écoule. Mais ses aventures sont plus un empilement de missions étranges nées d’idées qui, pour moi, ont parfois manqué de cohérence. Créer des péripéties, des pépins, appelez ça comme vous le voudrez, tout au long du roman pour que l’héroïne découvre sa force et son courage, OK. Mais là, c’est bourré de quêtes secondaires un brin WTF (encore une fois, ce n’est pas parce qu’on écrit pour des enfants que tout ce qui est magique est merveilleux…). Parfois, j’ai eu la sensation d’un manque de direction, ou de but, d’un chapitre ou d’une aventure de remplissage. Sincèrement, ça aurait pu fonctionner si on avait eu « Les aventures de Violette dans son jardin : un jour, une mission ». Mais comme l’enjeu est de taille, je me suis demandé ce que venait faire tout ça au milieu de la quête de mon héroïne.

Bref, ce n’est pas non plus un roman détestable, mais la structure et la forme ne m’ont pas convaincue, même si, effectivement, Violette trouve sa force et son courage. Visiblement, je fais partie des rageux jamais contents puisque le roman a été récompensé du prix Lecteurs du Journal de Mickey, donc n’hésitez pas à vous faire un avis 🙂

Pour info :
éditions Sarbacane, 496 pages, 2019

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L’Année de grâce (Kim Liggett)

Amis du jour, bonjour !

C’est un nouveau carton plein pour la lecture du bookclub de février ! Pourtant, le roman du mois ne partait pas gagnant. J’en avais entendu des avis très mitigés, certains trouvaient que le roman n’allait pas assez loin ; pour d’autres, il avait changé leur vie. Pour d’autres encore, c’était une déception pure et simple. Pas évident donc d’aborder cette lecture de manière sereine…

Le Pitch
Dans le village ou vit Tierney, il est dit que les jeunes filles, en grandissant, développent une mauvaise magie, de celle qui tente les hommes. Afin d’en dissiper ses effets et de la laisser se dissoudre, elles sont, à l’âge de 16 ans, envoyées dans la forêt pendant une année entière. Une année dont personne ne parle. Une année dont toutes ne reviennent pas vivantes…

Mon avis
Je ne fais pas durer le suspens (et de toute façon si tu as suivi le live du bookclub ou mes stories, tu sais), j’ai beaucoup aimé. On se retrouve dans une ambiance type Le Village (le film où ils vivent dans un bled isolé dans la forêt où de soi-disant monstres les empêchent de partir). Il est difficile de réellement dater le contexte… dans un passé lointain ? Un post-apo ? On nous parle des terres de l’Amérique où l’on vit libre… En tout cas, clairement c’est poisseux. L’inimitié entre les femmes est encouragée par des hommes qui les jugent, les mettent en compétition, les font se surveiller.

Elle sont dépossédées de leur corps, de leur vie, et n’ont d’autre choix que de se méfier les unes des autres (au mieux), ou de se haïr (au pire). Le trait est grossi, mais cette situation est-elle si différente de celle que nous vivons aujourd’hui ? Quel média, quel discours, quelle œuvre nous pousse, nous, femmes, à nous respecter, à nous aimer, à nous entraider. Car, tel le miroir de la méchante reine, la société ne sait que nous dire que nous ne sommes pas la plus belle. La plus intelligente. Nous ne sommes jamais assez, jamais autant que. Et ce miroir de vérité devient un instrument de torture sorti du palais du fun à la foire du Trône.

Le roman est violent, il montre les dangers du besoin viscéral d’appartenir à un groupe, mais aussi le pouvoir que peut avoir ce groupe lorsqu’il décide de s’apaiser et de soutenir ses membres. Tierney vit un cauchemar, mais c’est ce cauchemar qui lui permet de découvrir sa force, de reprendre possession de son corps, de ses désirs et de ses sentiments. J’en ai entendu beaucoup critiquer la romance qui s’installe, la jugeant trop soft et vectrice de stéréotypes. Là où l’on peut effectivement voir une romance, j’ai vu une jeune fille briser ses craintes, les carcans dans lesquels son éducation l’avait enfermée, pour enfin s’écouter et accueillir son désir et sa corporalité.

La fin divise également, puisque manifestement, beaucoup y ont décelé un destin funeste. De nombreux éléments ne sont effectivement dévoilés qu’à demi-mots, si bien que l’interprétation personnelle de chaque lecteurice est valable. Personnellement, j’y vois plutôt l’espoir d’une société en voie de guérison, qui ne sait avancer qu’à petits pas, mais qui s’apprête à opérer une révolution silencieuse. Un acte de gentillesse est parfois anodin. Parfois, il ne l’est pas. Et la magie dans tout ça ? Parce que vous croyez à la magie vous… Bref, pas de grosse révolution, de parfait féminisme, rien n’est propre, rien n’est blanc… à lire.

Pour info :
grand format : éditions Casterman (trad. Nathalie Peronny), 448 pages, 19.90€
poche : éditions Gallimard Jeunesse, coll. Pôle fiction, 480 pages, 8.70€

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La Saga des Mystères : pentalogie (Jeff Wheeler)

Amis du jour, bonjour !

Décidément, cette année aura été chez moi celle des éditions Rivka, puisque j’ai commencé et terminé, non pas une, mais 2 séries de leur catalogue. La première, la quadrilogie Le Lys de feu, avait été un franc succès. Voyons ce qu’il en est des cinq tomes de La Saga des Mystères.

Le pitch :
Cettie et Séra vivent une vie bien différente. Tandis que la première, orpheline, enchaîne les familles d’accueil peu scrupuleuses et vit dans la misère et la pauvreté, terrifiée par des fantômes qu’elle semble être la seule à voir, la seconde, petite-fille de l’Empereur, profite du luxe de son palais flottant, ne rêvant que de découvrir le monde. Mais leur vie est sur le point de changer lorsque le fortuné vice-amiral Fitzroy recueille Cettie à Saules de Brume, et qu’il se murmure que l’Empereur pourrait choisir Séra, et non son propre fils, comme héritière…

Mon avis :
J’enchaîne rarement les tomes d’une série, surtout en audio. Je préfère diversifier les ambiances, les styles, et ne pas m’enfermer dans un type de narration ou de récit, au risque d’avoir du mal à en sortir. Ici, bien que sachant qu’il s’agissait d’une pentalogie, je n’ai pu m’empêcher de dépenser crédit après crédit pour continuer. Mais quelle petite perle a trouvée Rivka !

En dehors d’un monde construit, aux règles mystiques mystérieuses qui seront en partie révélées tout au long des cinq tomes, c’est une histoire qui fait la part belle à ses personnages. Attachants, effrayants, repoussants, rarement immaculés, souvent nuancés, ils ouvrent un dialogue autour des croyances et de la paix, des secrets des puissants et des intrigues de cour.

Au milieu de ce maelstrom d’idées et de péripéties gravitent deux jeunes filles courageuses, qui subissent échec, humiliations et trahisons, et dont les victoires ne sont que plus éclatantes. Je n’ai honnêtement pas eu besoin de posing (oui, tu sais, la super nana qui se tient au bord de la falaise, cheveux au vent, les yeux vissés sur l’horizon) ou de punchlines à 3 francs pour me dire « eh bah elle en jette vachement quand même ! » On n’a pas eu besoin de me hurler à la figure « t’as vu mon personnage féminin hyper badass ? » C’était donc une leçon du « ne le dis pas, montre-le » dont je suis si friande et qui devrait, selon moi, être la base de tout bon roman.

Et si je dois avouer que sur le dernier tome, j’ai eu une grosse impression de sermon religieux (rien de rédhibitoire, c’était plutôt tourné vers le courage, la foi et la tolérance hein), je ressors de ces 5 romans avec l’impression d’avoir vécu une aventure pleine de sens, dont les personnages ont effectué un réel cheminement à travers la peur, la douleur et le deuil. Des héros aux multiples facette capables d’amour, de compassion et de rédemption, mais aussi de haine et de trahison. Une série dont je vous recommande la lecture, donc, à partir de 13 ans (et jusqu’à 147 ans). Petit plus : ils sont magnifiquement reliés et coûtent tous moins de 20€.

Pour info :
éditions Rivka (pour les 3 tomes sortis actuellement), traduits par Ariane Maksioutine, 18€
Saules de Brumes, 448 pages
Porte Miroir, 416 pages
Ciel d’orage, 432 pages

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La Fille renard et la merveilleuse boutique-sur-pattes (Andy Sagar)

Amis du jour, bonjour !

Vous connaissez ces romans qui vous font envie de ouf, dont le pitch fait palpiter votre petit cœur de lecteurice, mais qui tombent complètement à plat ? J’ai bien peur que ma lecture du jour soit de ceux-là.

Sarakontkoi ?
Felicity Fox déteste ses oreilles de renard, qui lui valent d’être exhibée dans un cirque ambulant depuis sa plus tendre enfance. Lorsqu’un corbeau, familier de la sorcière de thé Miss Dumpling, vient la délivrer et lui annonce qu’elle a été choisie pour devenir l’apprentie de sa maîtresse, Felicity n’hésite pas. En chemin, elle fait pourtant une rencontre étrange, un homme qui lui propose de la débarrasser de ses oreilles… mais le contrat est truqué et le temps de Felicity est compté…

Tenpenskoi ?
Comme je l’ai dit, j’avais très très envie d’aimer ce livre. Un salon de thé qui marche bon sang ! Des thés qui soignent, des pâtisseries, un RENARD ! Mais que s’est-il passé ? Tout a commencé à la page 20, quand une gamine s’égare dans la forêt parce qu’elle perd de vue l’animal qui est venu la délivrer (bravo le guide !), et qu’elle tombe sur un mec louche, à qui elle ne fait pas confiance, mais elle SIGNE quand même un contrat avec lui. Cinq minutes de lecture et je me dis déjà qu’il y a un souci de construction. Le roman me prend un peu pour une débile tout le long, me martèle des choses qu’il pense que je n’ai pas comprises… Le tout m’a donné une impression décousue.

Les péripéties s’enchaînent, mais parfois c’est trop long (tu comprends en lisant une phrase par page), parfois ça saute du coq à l’âne. Des violons magiques qui charment les monstres sortent d’une poche (WTF ?), et moi, tout ce que j’entends, c’est « ta gueule, c’est magique… et c’est pour les mômes ». Et je me demande pourquoi on prend les mômes pour des teubés. Trop de questions explicitement posées sans réponse, de deus-ex-machina (le truc qui sort de nulle part où tu te dis « comme par hasard »), alors que bon sang, le roman regorge de thèmes et d’items géniaux, comme les thés concoctés spécialement pour chaque consommateur, chaque situation, l’idée de pacte faustien, de recherche des origines, d’estrangelins (êtres magiques abandonnés chez les humains qui ont donc oublié la magie)… Et puis, on en parle de cette traduction ? Pourquoi un nom aussi signifiant que Yesterday Crumb (littéralement « hier » et « miette », ce qui aurait une réelle importance dans la construction du personnage) devient un banal Félicity Fox (oui, on avait compris qu’elle avait des oreilles de renard) ? Bref, je suis en colère, parce le potentiel était incroyable et qu’on s’est laissé aller à la facilité. C’est un peu paresseux, et c’est très dommage.

Pour info :
éditions PKJ (trad. Emmanuelle Gros), 336 pages, 16.20€

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Les Whisperwicks, T1 : Le Labyrinthe sans fin (Jordan Lees)

Amis du jour, bonjour !

Enfin — ENFIN ! — je peux vous parler de cet énorme coup de cœur que je retiens depuis 2022, puisque j’ai eu l’immense privilège d’en faire la lecture à l’état de manuscrit alors que Penguin Random House n’avait pas encore annoncé sa publication. Oui, je me la pète oui. Mais ce manuscrit, c’est un peu mon bébé ! Alors je triche un chouilla, je profite de sa sortie en VO pour vous proposer une chronique avec une semaine d’avance sur sa sortie française…

Sarakontkoi ?
Benjamiah Creek, 11 ans, est un gosse cartésien ; la magie, pour lui, ça n’existe pas. Mais lorsqu’il reçoit mystérieusement en cadeau une poupée qui lui parle, il croit devenir fou, jusqu’à ce qu’elle l’entraîne dans l’étrange monde de Dedaleum, un univers labyrinthique où il ne fait pas bon se perdre. Et se perdre, c’est justement ce que doit faire l’intrépide Elizabella pour retrouver son frère Edwid, qui a disparu. Benjamiah et Elizabella partent donc à la recherche des fameux whisperwicks semés par Edwid…

Tenpenskoi ?
Explosion dans ma tête. Les romans destinés à un public 9-11 ans peinent à éveiller mon intérêt (oui, je sais, je ne suis pas la cible, mais je suis censée les conseiller). Ceci dit, avant même que je ne comprenne ce que j’étais en train de lire, j’étais déjà incapable de lâcher le roman.

Le roman est tellement riche qu’il est difficile de vraiment le résumer. Et quand je dis riche, je veux parler de style, de personnage, de construction d’univers et d’intrigue. Oubliés les personnages casse-bonbons insupportables de suffisance, aux surnoms/diminutifs infantilisants. Pas de roman « à couettes » parce que c’est pour les petits. Le roman est construit comme son décor, un labyrinthe, qu’il faudra explorer pour en obtenir toutes les clefs. On y parle de réalisation, d’ouverture à l’autre, de deuil aussi.

L’univers est tantôt magique et enveloppant, tantôt angoissant et étouffant, merci le labyrinthe. C’est très visuel, et inventif. J’y ai retrouvé des concepts de Pullman, mais aussi l’étincelle de Nevermoor (auquel j’ai préféré Whisperwick, désolée). Émotionnellement c’est une claque assez osée pour un roman jeunesse middle-grade. Bref, un texte qui joue clairement dans la catégorie des grands du genre, que je conseille, personnellement, plus à partir de 11 ans.

Pour info :
éditions Auzou (trad. Juliette Lê), nombre de pages inconnu (pour le moment), 24.95€ pour sa version reliée, 16.95€ pour sa version souple

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L’Anti-magicien, T1 (Sébastien de Castel)

Amis du jour, bonjour !

Je suis toujours tiraillée à l’idée de chroniquer un tome 1 sans avoir lu la suite. Je trouve plus logique de proposer mon avis sur la série complète. Mais comme celle-ci compte 6 tomes et que je ne vous en parlerai jamais si j’attends autant, découvrons ensemble si cette entrée en matière fut concluante.

Sarakontkoi ?
Kelen, 16 ans, est l’héritier d’une des familles les plus puissantes de la cité. Les adolescents y développent normalement une prédisposition pour une des 7 formes de magie : braise, souffle, fer, ombre, sang, soie, sable. Kelen, contrairement à ses camarades, semble peu à peu perdre de ses pouvoirs. Malgré les ruses qu’il déploie, il ne pourra pas le cacher bien longtemps. Et c’est sans compter sur l’arrivée de Furia, la vagabonde, et de Rakis, un chacureuil à la verve vive et aux griffe acérées.

Tenpenskoi ?
Alors là, soit votre esprit s’est arrêté à « chacureuil », soit vous vous dites « euuuuuuh, quoi ? » Et à raison. Parce que moi aussi, j’ai cru qu’on allait suivre les affres d’un ado qui entre à l’école et déploie des trésors d’intelligence pour tenter de cacher son manque de magie. Bah non. C’est beaucoup plus travaillé. On y parle notamment de secrets de famille, de politique (intérieure et extérieure), de mensonges. Et les personnages secondaires, bien loin de se satisfaire de cet épithète, volent souvent la vedette : toujours le bon mot, la petite plaisanterie, la punchline qui te met au tapis. Furia remet carrément en cause toutes les certitudes de Kelen, le poussant à se questionner sur le sens réel de la magie. Rakis, quant à lui, profère toutes sorte d’insultes plus drôles les unes que les autres.
Kelen est un jeune homme en plein questionnement, intelligent, certes, mais par dessus tout persévérant, un Joe-la-débrouille plein d’esprit et de courage, McGyver de la fantasy. Donc plutôt qu’une montée en puissance du protagoniste, on est plutôt sur une prise de conscience des manigances, des mensonges et des injustices. Une série qui promet d’être riche en thématiques, des personnages hauts en couleur, un contrepied par rapport aux publications actuelles… je dis go !

Pour info :
éditions Gallimard Jeunesse (trad. Laetitia Devaux), collection Pôle Fiction, 464 pages, 8.50€

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Mille Pertuis, tome 1 : La Sorcière sans nombil (Julia Thevenot)

Ami du jour, bonjour !

J’en cause, j’en cause (sur les réseaux, autour de moi) mais il serait peut-être que temps que je rédige cette chronique, nom d’une pipe en bois !

Sarakontkoi ?
Ortie a une quinzaine d’années. C’est une sorcière, et la sorcellerie, c’est une histoire de femmes. Très jeune, Ortie apprend qu’elle devra suivre son destin, son Nord, auquel elle est rattachée par le nombril. Seulement voilà, quand on est une enfant, qu’on joue avec les copains, ces histoires métaphoriques de Nord, de destin, de secret autour de la magie, ça ne veut pas dire grand-chose. Et Ortie commet la plus grosse erreur qu’une sorcière puisse commettre… Et passe les années qui suivent à tenter de la réparer.

Tenpenskoi ?
Quand j’ai reçu le bouquin de la part de Gallimard Jeunesse (parce que oui, c’est un service presse), ma première réaction a été « chouette couverture ! » En lisant la quatrième, je me suis gratté un peu le scalp. C’était chelou. Une sorte d’aura étrange se dégageait du roman. Et puis cette couverture, quoi ! Des Tic-tac, un stylo, des plantes, une cup menstruelle… aucun sens. J’ai commencé ma lecture, et j’ai calé. L’espace d’un instant, je me suis demandé ce qu’on m’avait envoyé. Mais j’étais fascinée, de cette fascination qui maintient nos yeux ouverts devant une scène bizarre au ciné. Et enfin, sans que je comprenne comment ni pourquoi, je me suis retrouvée, telle une mouche imprudente, prise dans la toile de Julia Thévenot.

Mille Pertuis, c’est une histoire de femmes, au sens le plus littéral et cru du terme. La sorcellerie est un monde de femme, et la magie vient de leur corps. Leur salive, leur sang… et donc leurs menstrues (oh, écoute, prends un dico !). C’est une magie viscérale, crue, organique, pas jolie. Mais tellement pratique, physique, tangible ! Ortie est un personnage touchant, dès son enfance. Sa petite sœur, l’impayable Ronce au régime alimentaire peu habituel (sauf si t’aimes la Javel), et la parfaite aînée Épine, fière et appliquée, la mère mystérieuse, sont géniales. Bref, je sens bien qu’on ne me dit pas tout, que comme Ortie, je navigue à vue. J’ai beau avoir 34 ans, mais j’ai l’impression de découvrir mon corps en même temps qu’elle !

C’est drôle, ça questionne, ça avance, ça s’aventure, ça bégaye, ça embraye, et ça finit trop vite. La suite n’arrivera jamais assez tôt !

Pour info :
Gallimard Jeunesse, 432 pages, 19.90€

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Dents de soie (Maëlle Desard)

Ami du jour, bonjour !

Me voici de retour après un été peu productif, et néanmoins guère reposant. Qu’à cela ne tienne, on s’y replonge, avec ferveur et moult thés glacés, parce qu’après tout, c’est pour l’amour de la littérature… et de Maëlle, bien entendu.

Sarakontkoi ?
Navi en est certaine, elle est la meilleure des fées de sa promotion… probablement de ces derniers siècles. D’ailleurs, elle sait qu’elle va intégrer l’élite : les fées marraines. Mais si son univers est rose bonbon, le monde, lui, est teinté de zones d’ombre ; elle finit chez les fées des dents à récupérer les chicots sous les oreillers et à soigner des molaires négligées. Elle doit absolument prouver qu’il y a eu erreur. Pour ce faire, la première étape, c’est de se trouver une PP (Princesse Potentielle) et de l’aider à atteindre son happy ending. Il se pourrait d’ailleurs qu’elle en ait trouvé une en la personne de Devin, un vampire taciturne sans canines réduit en esclavage dans un clan ennemi…

Tenpenskoi ?
Les romans de Maëlle, c’est toujours un délice, la sauce 1954 sur mes chili cheese, mon granité à la pomme en pleine canicule, ma moussaka authentique dans ce petit resto grec paumé dans les collines hellènes… Bref, je ne suis jamais déçue. D’ailleurs, je n’ai que son nom à la bouche dans mes conseils. Un truc drôle : Maëlle. Un truc émouvant : Maëlle. Un truc pour se détendre : Maëlle. Un truc original… t’as compris le concept. Je suis toujours transportée de voir que son lectorat s’agrandit à chaque roman (même si je suis toujours un peu jalouse parce que, faut pas déconner, moi j’étais là day one !… ou presque).

Ce roman ne fait pas exception. Navi, comme Esther (et c’est ce que j’aime chez ces deux jeunes femmes), n’a pas sa langue dans la poche. Elle SAIT qu’elle est la meilleure. Alors se retrouver en bas de l’échelle sociale ? No way ! Et puis, c’est un personnage expansif, du genre explosif, qui prend de la place. Parce que plus une fée est puissante, plus elle est énorme. Et Navi est très très très puissante… Surtout ne pensez pas que parce qu’elle est badass, c’est pantalons et tuniques confortables, nooooon. Navi aime le rose, les robes somptueuses, et être éblouissante à chaque instant. Christina Cordula, tu n’as qu’à bien te tenir.

Et que dire de Devin, ce vampire révolté, humilié et empli de rage silencieuse qui, au premier coup d’œil, tombe sous le charme de son éblouissante fée marraine improvisée ? On adore s’en moquer avec elle, des vampires taciturnes de Maëlle !

La première fois que Maëlle m’a parlé de son roman, je me suis dit « mais WTF ?! » et en même temps, je savais. Je savais qu’avec sa plume, son verbe, et son imagination un brin tordue, on allait arriver à un truc barré, d’une qualité impeccable, et drôle de surcroît. En fait, je ne sais même plus quoi dire pour te convaincre de te plonger dans ce bouquin. Juste, fais-y, comme on dit chez moi…

Pour info :
éditions Slalom, 400 pages, 16.95€

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Six couronnes écarlates, T1 (Elizabeth Lim)

Ami du jour, bonjour !

Une fois n’est pas coutume, je te parle d’une sortie récente (je suis dure avec moi-même, ça m’arrive tout même de temps en temps). Un roman que j’ai lu avec mes copines de lecture commune, j’ai nommé Charlotte et Marilyn. Et pour une fois, c’était moi le chat noir…

Sarakontkoi ?
Toute magie a été bannie du royaume de Kiata. La princesse Shiori est promise à un seigneur de petite lignée qu’elle refuse d’épouser. Lorsqu’elle surprend sa belle-mère en plein rituel, celle-ci transforme ses six frères en grues, et lui interdit de parler ou de dévoiler son identité sous peine de tuer ses frères. Commence pour Shiori un long voyage à travers son royaume pour tenter de sauver ses frères et de lever la malédiction.

Tenpenskoi ?
Je ne vais pas passer par quatre chemins, je suis très mitigée. D’autant plus que j’ai lu le roman avec des copines qui, elles, ont adoré ! Pour commencer, un gros big up sur le choix du conte qui est à la base de cette réécriture (parce que c’en est une), une sorte de mélange entre Les Cygnes sauvages d’Andersen et Les Six Cygnes des frères Grimm. Il partait donc sur un bon point puisqu’il entrait pour moi dans la catégorie des contes peu repris (coucou D’Or et d’oreillers avec La Princesse au petit pois, et La Malédiction de Highmoor avec Le Bal des douze princesses). Alors c’est vrai que sur la fin, je n’ai pas lâché le bouquin, que ça se lit facilement, même si le style n’est pas fou. Il y a quelques fulgurances narratives, et oui, pourquoi pas le transposer dans un univers japonisant puisque c’est la mode… Donc en soi, pas une lecture désagréable.

Mais tu imagines bien qu’il y a un « mais »… Je ne m’y sentais pas bien. J’ai trouvé que ça manquait de contexte, et que le peu qui nous était donné n’était pas clair (plusieurs fois j’ai levé les yeux en me disant « hein ? »). Reprendre un conte, c’est cool, mais il faut l’étoffer, et surtout l’approfondir. Ici, c’est étoffé, on y a ajouté de l’action, des trucs qui n’existent pas dans le conte, d’ailleurs on part sur tout autre chose à la fin. Mais voilà, c’est tout ce qu’on a fait, l’étoffer et y ajouter de l’action. Personnellement, j’ai besoin de savoir qu’un royaume a du vécu, un peu comme si je débarquais dans un univers hyper rodé ; c’est ça qui permet de sortir du format « conte » où le lecteur est censé accepter des faits établis. Là, on me dit « il s’est passé ça il y a des milliers d’années, mais on a tout oublié depuis, sauf une légende ». Ok.

Beaucoup de facilités (vous reprendrez bien un peu scenarium Madame), notamment, et je ne divulgache rien puisque c’est littéralement le premier chapitre, la princesse qui fuit de sa cérémonie de fiançailles parce que son oiseau en papier s’est envolé (pourquoi ?) et qu’elle le suit et plonge dans le lac. Ca n’a aucun sens. Déjà, ça partait mal. De plus, si je suis en point de vue interne (donc dans la tête de la protagoniste), que je ne vois que ce qu’elle voit, qu’on a les mêmes éléments de réflexion et que je devine un truc et pas elle, ça me gonfle. Et c’est comme ça tout le long. Du coup, ce n’est pas une mauvaise lecture, il en ressort tout de même du positif (quelques twists sympas, les relations entre les personnages, la complicité, la duplicité) mais trop d’éléments approximatifs et mal maîtrisés pour que je sois à l’aise dans ma lecture. Dommage, le livre est joli. D’ailleurs Rageot, ça serait sympa de préciser que c’est un tome 1…

Pour info :
éditions Ragot, trad. de Sophie Lamotte d’Argy, 560 pages, 18.90€

Publié dans BD, Bouquinade

Lightfall, T1 : La Dernière Flamme (Tim Probert)

Ami du jour, bonjour !

Comme d’hab, je découvre un truc limite avant sa sotie française, comme d’hab, je mets des plombes à la chroniquer, comme d’hab ça fait le buzz et je chronique après tout le monde. Bienvenue dans ma lose.

Sarakontkoi ?
Imaginez un monde où le soleil ne brille plus, et où il a été remplacé par d’énormes boules de feu qui créent un jour perpétuel. Bea vit avec un cochon sorcier, qui l’a recueillie enfant et qui fait office de grand-père. Lorsqu’il disparaît au cours d’une livraison, elle part à sa recherche et tombe sur Gad, un étrange personnage d’un optimisme désarmant, dernier de son espèce, les Galduriens. Lui aussi cherche le cochon sorcier, seule personne à pouvoir lire les textes anciens qui pourraient l’aider à trouver d’autres Galduriens… commence une quête semée d’embûches, de trahisons et de terrifiantes créatures.

Tenpenskoi ?
Je vais te parler de deux choses : le dessin et l’histoire. On commence naturellement par le plus évident, le dessin. Tim Probert a bossé tout seul sur le scénario, le dessin et la couleur (ce qui n’est pas si évident dans la BD). Il faut dire que, directeur artistique d’un studio d’animation (et ça se sent), il n’a rien à prouver. Le dessin est vivant, expressif. Mieux que ça, il est lumineux. Si tu as regardé ma vidéo sur les lectures du mois de mars, tu m’as entendu dire que, si tu éteignais la lumière, tu pourrais t’éclairer rien qu’en ouvrant le livre. Et c’est vrai ! Un délice visuel à chaque page !

Du côté de l’histoire, on n’est pas en reste. La critique majeure que je fais aux bandes-dessinées, c’est de passer très vite sur leur sujet, parce que le nombre de pages est limité, qu’il faut équilibrer le discours du texte et celui de l’image, et que bien souvent, ça foire. À moins de faire des BD à sketch, donc avec une mini histoire par planche/double page, mais c’est un peu de la triche. Savoir raconter une histoire en BD, c’est très délicat. Et là, c’est parfait ! Je ne reste absolument pas sur ma fin ! Je suis une aventure, je ris aux traits d’humour, ma gorge se serre devant les injustices… bref, une grande réussite.

Le festival international de la bande-dessinée d’Angoulême lui a même décerné le prix jeunesse (8-12 ans) en 2022. Alors par contre les gars, je sais pas si vous avez lu la BD, mais on n’est pas sur du 8-12 ans, on est plus sur du 12+, et même un adulte y trouverait laaargement son compte. D’ailleurs, parenthèse : je l’ouvre encore une fois, mais les jurys de prix, est-ce qu’on pourrait voir les enfants et leurs goûts tels qu’ils sont au lieu de chercher des livres qui plairaient aux enfants tels qu’on les imagine ? Moi j’aimerais voir des gosses voter en fait… Mais je m’éloigne du sujet, et du message principal qui est : il FAUT lire cette BD !

Pour info :
Gallimard Bande-Dessinée, traduit de l’anglais par Fanny Soubiran, 256 pages, 19.90€