Publié dans BD, Bouquinade

Ces jours qui disparaissent (Timothé Le Boucher)

Ami du jour, bonjour !

L’autre jour, j’ai quitté la librairie en me disant que, décidément, je n’avais pas assez à lire à la maison (LOL) et que j’avais ma foi bien envie de tenter quelque chose qui me ferait (attention, expression très à la mode) « sortir de ma zone de confort ». J’ai donc demandé à mon collègue, qui aime beaucoup la bande-dessinée, de m’en conseiller une. Mais pas une comme d’hab, qui correspondrait à mes goût (il essaie toujours de coller à mes demandes quand je veux un conseil) ; nan, un truc qu’il avait envie que je lise pour qu’on échange sur le sujet. C’est tombé sur celle-ci.

Sarakontkoi ?
Lubin se réveille un matin, persuadé d’être demain. Mais non, on lui apprend qu’il n’est pas venu travailler la veille et qu’il n’a prévenu personne. Ces épisodes d’absence se répètent, jusqu’à ce qu’il s’aperçoive qu’elles sont comblées par un autre jeune homme, qui habite son corps. Au départ, un peu d’organisation et de communication entre ces deux personnalités permettent une cohabitation harmonieuse. Mais alors que l’Autre prend de plus en plus de place, Lubin ne sait comment faire pour ne plus perdre ces jours qui disparaissent…

Tenpenskoi ?
Effectivement, je l’ai beaucoup vue passer sur les réseaux, mais ce n’est pas franchement une bande-dessinée sur laquelle je me serais arrêtée. Le trait est simple, les couleurs ont des tons très doux, pastel, et si j’ai commencé par me dire que j’aurais apprécié quelque chose de plus chiadé, j’ai fini par comprendre que plus eût été trop. Le propos est déjà compliqué, suffoquant, pas besoin d’en rajouter. Et puis, cette ambiance très propre, presque médicale, est probablement plus efficace pour nous plonger dans l’angoisse du vide.

Quant à l’intrigue, elle n’est pas en reste. On assiste, aussi impuissants que Lubin et ses proches, à cet effacement qu’il subit, on veut détester l’Autre. En même temps, peut-on demander à un être conscient de simplement rester caché à ne rien faire, de ne pas vivre, les jours où il occupe le corps ? Peut-on réellement lui reprocher de tenter de se construire une vie ? Lequel des deux Lubin est le vrai, le bon ? Lequel mérite plus ce corps ? Tout un tas de réflexions qui peut rendre le lecteur claustrophobe, comme Lubin qui est coincé dans son propre corps, dans ces jours de conscience qui lui sont accordées. Bref, une lecture bien plus psychologique et intéressante que ce à quoi je m’attendais. Et si ce n’est, pour moi, pas la lecture du siècle, j’ai très envie de vous la recommander, juste parce que l’expérience en vaut le coup.

Pour info :
éditions Glénat, 192 pages, 22.50€

Publié dans BD, Bouquinade

Peau d’homme (Hubert / Zanzim)

Ami du jour, bonjour !

Nous sommes sans aucun doute dans un petit cycle de lecture de bulles… Mais pour le coup, que du bon, alors pourquoi s’en priver ? Aujourd’hui, je vous parle d’un petit bijou que j’ai attendu dès l’annonce de sa sortie par Glénat sur Instagram. D’ailleurs, pour la petite anecdote, on est passés totalement à côté à la librairie (grrrrrr) et j’ai dû me le commander. Bien entendu, sortie de confinement toussa toussa, j’ai attendu ce qui m’a paru être une éternité ! Bref, elle est là, je l’ai lue, et pfouah !

Sarakontkoi ?
Italie, période Renaissance. La douce Bianca, fille d’un riche marchand, a été promise au jeune Giovani. Un pacte qui scelle un accord commercial plus que sentimental. Bianca n’a pas son mot à dire. Alors, pour l’aider à accepter, et surtout à connaître ce futur époux qu’elle vient de rencontrer, sa marraine offre à Bianca une peau d’homme qui lui permet, lorsqu’elle l’enfile, de déambuler sous les traits du jeune et beau Lorenzo. Si elle apprend effectivement à mieux connaître Giovani, elle découvrira bien plus que ce qu’elle était venue chercher.

Tenpenskoi ?
Mais. Quelle. Lecture ! Je vais avoir du mal à rester concise cette fois tant le contenu est riche ! On parle certes de la place de la femme, de son absence totale de liberté, de son combat, chacune le menant à sa façon, avec les armes dont elle dispose. Mais ça va tellement plus loin. On y parle de la place du genre (et par là je veux dire du sexe) dans la relation à l’autre, d’amour certes, mais aussi de respect, de liberté sexuelle, d’identité, de puritanisme religieux, de l’hypocrisie des bien-pensants… et Dieu que ça fait du bien ! Et quelle clairvoyance de la part d’Hubert, le scénariste, de nous proposer un réel changement de perspective (puisqu’il est physique) et d’aller au-delà du simple discours féministe. C’est une parole humaniste, libertaire et libératrice !

Et je ne te parle pas de l’intelligence du dessin, de la mise en scène (ou mise en case si je puis me permettre) ! De nouvelles idées à chaque page, qui servent le propos sans l’étouffer. La traduction par l’image de cette sensation de clostrophobie d’abord puis de libération, Le jeu des couleurs. C’est un ouvrage honnête, qui n’a pas peur de son message, qu’il dévoile sans pudeur, avec l’innocence de la jeune Bianca et de Lorenzo.

Au-delà du contenu idéologique, le livre est beau, sobre (bravo les maquettistes et la Fab chez Glénat). Il est grand et lourd. C’est un objet qui s’affirme, qui n’a pas peur d’être là et de dire ce qu’il a à dire. Bref, on pourra me dire « ouais, mais 27€ ». Probablement la somme que j’ai le mieux dépensée ces derniers mois. Parce que cette BD vaut. Chaque. Euro.

Pour info :
éditions Glénat, collection 1000 feuilles, 160 pages, 27€

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Moins qu’hier (plus que demain) (Fabcaro)

Ami du jour, bonjour !

Je te délaisse un peu en ce moment, j’en suis désolée. Je pense bien que tu n’en es pas encore au point où tu pleures l’absence de billet le soir dans ton lit, mais peut-être qu’avant-hier, tu t’es dit « tiens, depuis un moment, elle poste un peu moins ». Et tu as raison. En ce moment, je forme un nouveau collègue, donc j’ai moins de temps. Et j’ai repris la langue des signes. Donc encore moins de temps. Dans un cas comme dans l’autre, je suis ravie de ce que je fais, mais forcément, je suis moins disponible pour mon cher blog, et pour toi, lecteur.

Bref, je vais te causer d’une BD que je viens de terminer et qui me laisse un goût de… de gné.

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Sarakontkoi ?
Plein de petites histoires, un dénominateur commun : le couple. Mais le couple sous ses pires aspects. Le mensonge, le chantage, les enfants, le sexe, l’ennui, le fantasme de l’impossible : rien ne va plus.

Tenpenskoi ?
Déjà, ça s’avale très vite. Chaque « intrusion » dans la vie des couples ne fait qu’une planche (une page). Et heureusement. Le dessin est simpliste, mais j’aime bien ces touches de couleur. Je n’ai pas détesté.

Ensuite, mis à part deux ou trois planches improbables où j’ai franchement ri… bah j’y suis restée totalement insensible. Laissez-moi vous faire part d’une réflexion que je retiens depuis un certain temps: je n’aime pas cette stigmatisation de l’ordinaire qui semble gagner les bien-pensants. Le couple, ce n’est pas juste chiant. Ce n’est pas juste une prison, et ce ne sont pas que des compromis. Les enfants ne sont pas juste un purgatoire.

Après, tu me diras : « oui, mais c’est juste que tu te sens visée ». Effectivement, je me sens visée. Je suis mariée, et je suis heureuse. Ca ne fait pas de moi, ou de mon époux, quelqu’un de naïf, de moins intéressant, ou pire ; ça ne fait pas de moi un mouton. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, à moins d’être dans le rejet du conventionnel, on n’a que peu d’intérêt.

Je ne me bats pas contre le monde entier pour défendre mon orientation sexuelle, ma sexualité, ma couleur de peau, mais ça ne fait pas de moi quelqu’un de fourbe, de menteur ou de plat. Et c’est ce que ce livre m’a fait ressentir : que le couple conventionnel était chiant et risible. Ca m’a fait de la peine. Pas pour moi, parce que je n’ai rien à prouver. Mais pour ceux qui se laissent envahir par le cynisme au point d’oublier tout ce que la vie offre de positif. Et l’amour en fait partie. Du coup, je l’ai offert à Chéri pour nos 3 ans de mariage.

Ceci dit, j’ai lu le résumé de Zaï Zaï Zaï Zaï, et franchement, il me fait un peu plus envie. Donc je ne suis pas hermétique à l’auteur.

Pour finir, je partage avec vous une vidéo de la chaîne Et tout le monde s’en fout, qui résume très bien mon opinion sur le couple.

Pour info :
Glénat, collection GlénAAARG !, 64 pages, 12,75€