Publié dans Albums, Bouquinade, Litté de l'imaginaire (SF, Fantasy, Fantastique)

L’Étrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde (Robert Louis Stevenson / Maurizio Quarello)

Ami du jour, bonjour !

Je le sens bien là, je vais te faire une petite série d’albums. En gros, de tout ce que nous avons rapporté de Montreuil. Et je commence par un classique, s’il vous plaît. Ni Chéri ni moi ne l’avions lu, alors pendant les 4h qui séparent Paris de notre petit coin d’Auvergne, je lui ai simplement fait la lecture à haute voix. Et franchement, au-delà du texte, c’était un super moment de partage ! Alors je m’en va te causer de ce très beau livre.

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Sarakontkoi ?
M. Utterson, notaire de son état, s’inquiète de la santé et de l’état de son ami, le Dr. Jekyll. Il se conduit étrangement, souhaite établir son testament et faire don de sa fortune à un certain Hyde, un effrayant bonhomme qui fait naître chez son interlocuteur une terreur instinctive. Est-il victime de chantage de la part de cet affreux personnage ? Pourquoi est-il si secret ? Et qu’est-ce qui a bien pu dégoûter à ce point leur ami commun, le Dr Lanyon, au point qu’il refuse tout contact avec Jekyll ?

Tenpenskoi ?
En vrai, la réponse, tu la connais : Jekyll et Hyde, c’est le même zozo. Les deux facettes d’une même pièce. L’individu, déboussolé, effrayé de voir naître en lui de noirs désirs alors que lui est si travailleur et vertueux, tente de se détacher de cette part sombre qu’il cache. Ainsi, il pourra être un homme aussi bien qu’il le souhaite et ne plus se sentir coupable des agissements de son alter-ego.

La réflexion est plus qu’intéressante. Détacher le bon du mauvais, pour éviter de souffrir. Mais surtout, se déresponsabiliser. En cela, je trouve Jekyll lâche. Son amour de la science, son envie d’être bon, mais sans effort. C’est trop facile. Nous sommes bons parce que nous avons en nous cette dualité. Sans elle, nous ne sommes rien. Plats. Il faut le yang pour le yin. La peur pour le courage. La faiblesse pour la force. La tristesse pour la joie. Ce qui est brillant, c’est que, contrairement au Dr Lanyon, le narrateur, M. Utterson, est neutre, sans réel jugement. Le lecteur est alors libre de se faire sa propre idée, de réfléchir par lui-même aux implications d’un tel acte. Si tu le lis, tu n’auras peut-être pas du tout la même opinion que moi…

Pour ce qui est des illustrations, elles sont très jolies. Les couleurs et l’ambiance servent tout à fait le propos. Ceci dit, j’avoue que si je reconnais le talent de l’illustrateur, je ne suis pas particulièrement touchée par ce qu’il me propose. Elles respectent une certaine charte, des codes qui créent l’angoisse. Mais je comprends qu’on veut m’angoisser. C’est compliqué à expliquer… J’aurais peut-être préféré quelque chose de moins conventionnel et de moins parfait. Parce que oui, quand tu regardes, c’est un vrai travail d’artisan, mais sur une notion si sujette à controverse que la dualité de l’être, je me serais attendue à une plus grosse prise de risque. Mais je chipote, c’est un très beau livre.

Pour info :
éditions Sarbacane, collection Grands classiques illustrés, 96 pages, 23,50€

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Enfants de la paranoia (Trevor Shane)

Amis du jour, bonjour !

Je commence avec l’info OSEF (= on s’en fout) du jour : j’ai fait une dictée. Une dictée de grand, super difficile ! J’ai fait des fautes, mais je suis assez fière de mon résultat. Bon, le bulletin info perso étant clos, passons au petit chef-d’œuvre que m’a conseillé ma très chère amie Maëlle.

Sarakontkoi ?
Joseph, la vingtaine passée (23 si ma mémoire est bonne), est un assassin professionnel. Depuis l’âge de 16 ans, il est engagé dans une guerre invisible entre le Bien (son camp) et le Mal (les autres), endoctriné pour chasser et haïr le camp adverse. La Guerre a des règles. Trois : on ne tue pas les innocents (ceux qui ne sont pas engagés dans la Guerre), on ne tue pas les enfants de moins de 18 ans, on ne fait pas d’enfants avant 18 ans. Mû par un besoin de vengeance après la perte de ses proches, Joseph parcourt le pays de mission en mission. Mais une rencontre peut tout changer…

Tenpenskoi ?
Absolument délicieux ! À peine avez-vous mis un pied dans le roman que vous êtes aspirés par une spirale infernale, de froides certitudes d’abord, puis de doutes et enfin de courses-poursuites. Le Bien et le Mal se veulent tranchés, et les camps se sont tous deux déclarés du côté des gentils. Les complots se tissent, et les liens aussi. Des liens au-delà de la raison, des liens qui font s’écrouler des murs de certitude. Joseph n’est pas le gentil. Il n’est pas l’anti-héros non plus. Ni naïf, ni particulièrement intelligent. Il est ce que vous et moi serions, fait ce que vous et moi ferions si nous avions pris part à cette guerre. Et Maria… Maria est un bonbon acidulé, coloré, piquant, qui nous file un coup de fouet, un courant d’air en été.

En voyant la couverture, je me suis dit « diantre, que m’a-t-on ramené là ? ». Je n’osais pas vraiment dire à Maëlle que le genre vieux polar kitch n’était pas mon truc (oui, la couverture jaune et noir, la typo, tout ça, franchement, ça m’encourageait pas). Et puis, j’ai commencé à le lire, et il m’a accompagnée pendant mes voyages en RER. J’ai appris à aimer Joseph, Maria, et à vouloir protéger avec eux leur secret. J’ai été particulièrement touchée par la scène finale. Il devait y avoir une suite, mais à l’heure où je vous parle, rien n’est moins sûr. J’aimerais pourtant que vous le lisiez, et que, comme moi, vous parcouriez le chemin qu’a fait Joseph, qui questionne notre morale. Tuer, être tué, ou bien… ?

Soit dit en passant, rapport à mon dernier billet, celui-ci, vous pouvez le prendre dans votre sac de plage !

Pour info :
Michel Lafon, 368 pages, 19,95€ chez votre libraire adoré (ou dans le point relay de votre gare / duty free)

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La Couleur de l’âme des anges (Sophie Audoin-Mamikonian)

Chers amis bloggeurs/lecteurs,
Me voilà de retour de vacances, officielles pour ce qui est du travail, officieuses pour mes lectures et mes billets ici. Mais me revoilà. Vous, par contre, êtes très certainement en train de siroter un coktail au bord d’une piscine, ou de vous tartiner de crème solaire, ou peut-être même de surfer sur le net à la recherche d’un plan pas cher de dernière minute… ce qui vous amène peut-être fortuitement ici. Pour ma part, je m’en vais vous parler d’un livre que vous… ne devriez pas mettre dans votre valise.

Sarakontkoi ?
Jeune prodige de la finance, Jérémy est sauvagement assassiné. Devenu un ange, il essaie de comprendre pourquoi et de se faire à cette nouvelle vie, où les anges se nourissent… des sentiments humains. Chaque sentiment a sa couleur et le caractère et la couleur des anges dépend des sentiments dont ils se nourissent (pour la faire courte, les bons sentiments sont plutôt bleus, les autres plutôt rouges). Jérémy tente de protéger Allison, qui a été témoin de son meurtre. Mais était-elle là par hasard ? Et comment la protéger alors qu’il ne peut interagir avec elle ? Aidé de personnages hauts en couleurs, il s’efforce de la garder en vie. Parallèlement, c’est aussi l’avenir du monde des vivants qui est en jeu, et les magouilles politiques pleuvent entre les anges rouges (les méchants) et les anges bleus (les gentils) pour obtenir le légitime pouvoir d’influencer, pendant la décennie à venir, le sort de la planète.

Tenpenskoi ?
Les personnages n’ont aucun reflief, j’aurais pu écrire sans les lire chaque réplique. Le déroulement est sans surprise et la banalité est déconcertante. Le style est plat, parfois lourd – notamment à cause de l’utilisation constante de périphrases qui sont invariablement les mêmes – et il reste des coquilles. Le héros meurt au début (je ne spoile pas, c’est la première scène), et toute une pseudo-enquête parcourt le livre. Mais le chemin labyrinthique des réflexions des protagonistes ne m’a pas emportée. Le gentil gagne toujours, il est très intelligent, il est un élu, bref, rien de bien surprenant. Les coups de foudre pleuvent et vas-y que je te tombe amoureux, youkaïdi-youkaïda. Cela dit, l’idée de départ aurait pu être bonne, mais même là, sans exemple à l’esprit, je n’ai en tête qu’un sentiment de déjà-vu.

Comme je le disais, lui accorder une place dans votre valise serait pour moi une perte de temps et d’espace. Je n’ai pas l’habitude de descendre des livres en flèche, mais pour le coup, j’ai l’impression d’avoir perdu mon temps et mon argent. D’ailleurs, je ne vous ai pas précisé qu’il s’agissait du premier tome d’une trilogie (je crois). Vous ne verrez pas les suites ici en tout cas. Cela dit, comme je suis bonne joueuse, je vous passe deux critiques, l’une élogieuse, l’autre mitigée :

Les rats de bibliothèque
Carnet de lecture et autres futilités

Pour info :
Robert Laffont, collection R, 447 pages (18,15€ en librairie)