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Thérapie de groupe (Manu Larcenet)

Ami du jour, bonjour !

Causons peu, causons bien, causons BD. Je te l’ai dit, je me suis fait, avant le confinement, une petite razzia du côté de nos amis les livres à phylactères (et si tu vois pas de quoi ça s’agit, je te propose un petit tour par ici). Je vais donc continuer de publier régulièrement sur le sujet. Et celui du jour m’est tombé dans les mains à la suite de de La Grande Librairie consacré à mon héros, Daniel Pennac. Le rapport entre Pennac et la BD (en dehors, merci ceux qui suivent, du petit trésor dont nous avons parlé il y a quelques semaines) ? C’est l’invité de l’émission, Manu Larcenet, qui est venu parler de son travail.

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Sarakontkoi ?
Manu Larcenet aime se mettre en scène dans ses BD. Enfin, lui et sa bipolarité. Ici, tout part d’une interview avec un journaliste à la radio, et de la question qu’il lui pose : quelle est votre prochaine idée ? De là part toute une réflexion, à la limite de la folie, sur l’inspiration, la naissance des idées, et surtout, la poursuite de l’idée du siècle…

Tenpenskoi ?
Bien qu’il m’arrive de ne pas être sensible à l’humour, et en particulier à l’humour noir, en BD, j’avoue que j’ai été captivée par la réflexion. En dehors du traitement complètement loufoque et borderline du sujet, Manu Larcenet nous expose un point crucial : la création demande du travail, des heures de réflexion, de doute, des pages blanches arrachées. Si certains peuvent vous pondre un livre par an, un tableau par jour, une symphonie par semaine, tant mieux pour eux. Mais la majorité de ces génies que l’on acclame s’arrache les cheveux, pleure sur son nouveau document Word intitulé Nouveau document Word, dont la page est aussi vierge qu’une nonne tout juste ordonnée.

Mélangez cet enfer créatif avec les troubles bipolaires dont l’auteur souffrait, et ça donne un sacré bazar ! De délires psychédéliques en désespoir profond, Manu Larcenet nous emporte dans un processus créatif très éloigné des paillettes illusoires du showbiz littéraire, là où le créateur, l’artiste, vend son âme à son œuvre et oscille entre génie et folie. C’est drôle, et c’est vrai. J’ai aimé.

Pour info :
éditions Dargaud, 56 pages, 15€

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Le Cercle du dragon-thé (Katie O’Neill)

Ami du jour, bonjour !

Tu l’auras compris (et tu le verras probablement sur mes prochains billets) je suis dans une période bande-dessinée. J’ai envie de bouquins qui se lisent vite, avec de jolis illustrations, mais pas des albums. Ergo : la BD. Et celle-ci, je l’ai attendue un bout de temps… toute une aventure, je te jure. Mais y’a un mais…

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Sarakontkoi ?
Dans un univers féerique, peuplé de faunes, de dragons et d’hommes, Greta apprend le métier ancestral de forgeron. Un jour, elle rencontre un drôle de petit dragon qui semble s’être échappé de la boutique de thé, à la limite de la ville. En l’y rapportant, elle fait la connaissance d’Hesekiel, Erik et Minette, qui élèvent et soignent les dragons-thé. Mais ces soigneurs sont de plus en plus rares, et Greta décide d’apprendre elle aussi à soigner ces créatures mystérieuses.
Tenpenskoi ?
Alors, pour le coup, j’ai du très bon, et du moins bon. Pour commencer, le très bon : le dessin est sublime, c’est craquant de mignonnerie, c’est coloré, c’est des bonbons à la bergamote qui fondent sur la langue. J’aime aussi beaucoup l’univers, cette idée que les feuilles qui poussent sur les cornes des dragons-thé renferment les souvenirs qu’ils partagent avec leur soigneur. Bref, toute la mythologie est vraiment sympa et originale, pour ce que j’en connais. L’autrice met aussi un point d’honneur à souligner l’importance du passage de savoir faire, ici dans le soin du dragon-thé ou dans la forge et la ferronnerie, mais en général aussi. Perso, je trouve que ce sont des messages nécessaires à faire passer aux jeunes générations.

Ceci dit, même si pour toutes les raisons énumérées au-dessus, j’ai apprécié ma lecture, j’avoue que deux choses m’ont gênée. Premièrement, j’ai trouvé l’histoire un peu courte : l’univers a l’air super riche, c’est dommage qu’il ne soit pas plus développé. Ou alors, il faut supprimer l’histoire des personnages secondaires, parce que soit on m’en dit trop, soit pas assez. Bon, disons que c’est pour un jeune public, et que ça suffit.

La seconde chose qui m’a fait hérisser le poil, c’est un problème de relecture / correction de la dernière partie de la BD (extraits du Guide du dragon-thé) : des coquilles orthographiques, grammaticales, et parfois même, des mots qu’on a oublié de supprimer en modifiant la phrase. Sans compter que la traduction, je suis désolée, laisse à désirer sur cette partie — autant dans les dialogues, ça passe parce que c’est court, autant dans un texte plus long… Outre les coquilles, certaines tournures sont à peine correctes et le texte pue la traduction à plein nez. C’est très dommage ! C’est comme si on me donnait Brad Pitt, mais que quand il ouvrait la bouche, il s’avérait bête comme ses pieds. Bref, lecture en demi-teinte, et comme mon Brad Pitt un peu neuneu, je l’exposerai, pour faire joli… 😦

Pour info :
Bliss comics éditions, 60 pages, 15€

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Un amour exemplaire (Daniel Pennac / Florence Cestac)

Ami du jour, bonjour !

Nouvelle lecture, et une fois n’est pas coutume, il s’agit d’une bande dessinée. Et pas n’importe laquelle ! Un scénario de Pennac (pour lequel vous connaissez mon amour) ! Figurez-vous que je n’aurais jamais su que cette BD existait si la médiathèque de mon quartier — dont je n’ouvre jamais les newsletters, mais là, si — ne m’avait pas envoyé un rappel pour m’inscrire à une rencontre avec — attention — M. Pennac himself ! Peu m’importait la raison pour laquelle il passait dans notre patelin, il était impératif que je participe à cette rencontre. Il s’avère qu’il s’agissait d’un échange avec des collégiens autour de ladite BD et du spectacle qui en a été tiré. Joué par un couple d’acteurs au top, accompagné de Pennac, et Cestac…

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Sarakontkoi ?
Pennac nous raconte l’histoire d’un couple atypique qu’il a connu dans son enfance, un vieux couple sans enfant. L’époux, un aristo déshérité amoureux des livres, a tout abandonné pour la couturière qui confectionnait la robe que sa mère devait porter à son mariage. Ils ont vécu toutes sortes d’aventures avant de faire leur nid dans la maisonnette d’un gardien de domaine. C’est là que le jeune Daniel a fait leur connaissance tout gamin.

Tenpenskoi ?
Sincèrement, j’ai beaucoup de mal à discerner la BD de la pièce, que je suis allée voir du coup. Cette BD est écrite du point de vue d’un enfant, le jeune Daniel Pennac, qui voue un amour inconditionnel à ses voisins, les Bosignac. Entre intrigues de village (est-ce que Bosignac triche aux cartes ?) et histoires extraordinaires (Mme Bosignac enlevée par son père après son mariage et j’en passe), ce livre, plein de tendresse, trace le portrait du bonheur. Pas le tout beau, pas le parfait, mais le vrai.

Et comme d’habitude, quand c’est Pennac qui raconte, dans la BD comme sur scène, c’est doux, c’est frais, et ça donne à réfléchir. Le spectacle se détache de la BD, selon les mots de l’auteur, en ce que le point de vue n’est plus celui du gamin qui vit cette histoire, mais celui des Bosignac, qui regardent avec une tendresse cet enfant s’attacher à eux, eux qui n’ont pas pu donner la vie. C’est un mélange de scènes entrecoupées de narration, relevées par le dessin, en direct s’il vous plaît (à la manière d’une lecture dessinée pour ceux qui connaissent) de Florence Cestac. Et en cela, les deux œuvres sont complémentaires. Du coup, lisez la BD, parce que c’est drôle, touchant et très vrai. Et puis, si d’aventure il passait par chez vous, allez voir le spectacle, parce qu’il vaut le détour !

Pour info :
éditions Dargaud, 64 pages, 15€

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La Boîte de petits pois (GiedRé / Holly R.)

Ami du jour, bonjour !

Tu as peut-être vu passer le petit trésor dont je vais te parler sur Insta hier, auquel cas tu as peut-être eu le temps de jeter un œil sur Google (ou Ecosia) pour te renseigner, et de courir chez ton libraire pour l’acheter. Et ça, c’est trop cool. Sinon, bah tu vas avoir un petit aperçu ici.

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Sarakontkoi ?
L’auteure/compositrice/interprète GiedRé évoque son enfance et celle de sa maman dans les années 80-90 en Lituanie (pays l’ex-URSS, à l’époque sous régime communiste). Elle raconte les tickets de rationnement, la guerre, l’espionnage, mais aussi le partage, l’entraide et la communauté.

Tenpenskoi ?
Je n’ai pas pu m’empêcher de me dire, au fil de ma lecture, que c’était le genre d’ouvrage qu’on devrait inclure dans les programmes d’Histoire. Avant de parler de dates, de traités. Avant de parler géopolitique et courant philosophique. Juste pour donner un contexte à tout ce bazar. Laisser quelqu’un qui nous raconte objectivement, sans nous dire que c’était bien ou mal, nous expliquer ce qu’il a vécu, sans en faire des tartines sur des romans de 1500 pages. Parce qu’ici, on différencie l’idéologie du régime communiste, et le comportement des hommes, femmes et enfants qui vivaient sous ce régime. Ca, c’est ma première impression.

Les textes sont très simples, avec cet air enfantin propre à GiedRé, qui se contente de raconter ses souvenirs, la manière dont ELLE a vécu les choses, sans ces œillères très occidentales et libérales qu’on nous impose souvent. Sans non plus glorifier le Régime. La peur n’est que de la peur, le jeu n’est qu’un jeu. C’est simple, c’est drôle, c’est émouvant. J’ai beaucoup aimé le post-scriptum, cette anecdote qui oppose le vécu de l’enfant à celui de l’adulte.

Un mot sur le dessin, entièrement réalisé — ainsi que le lettrage — au crayon de couleur (mes préférés). C’est doux, c’est tendre, c’est coloré, ça a la saveur de l’enfance. L’image, comme le texte, n’en dit ni trop, ni pas assez, juste ce qu’il faut. En bref, c’est bien dosé, c’est bien écrit, c’est très beau et ça t’oblige à adopter un autre point de vue. À mettre donc entre toutes les mains !

Un petit aperçu ?

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Pour info :
éditions Delcourt, collection Une case en moins, 112 pages, 15,95€

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Cœur de pierre (Séverine Gauthier / Jérémie Almanza)

Ami du jour, bonjour !

Aujourd’hui, c’est vendredi, et vendredi, j’aurais envie de dire que tout est permis, mais si c’était le cas, je ne me serais probablement pas levée ce matin ; Alexa, l’intelligence artificielle de notre enceinte connectée, nous a réveillés avec le doux son d’une musique folk. Alors bon, il a bien fallu sortir du lit. Dans ma tête, l’ambiance est à la mélancolie où pointe un soupçon de tristesse, mais que veux-tu, il faut aller.

Alors aujourd’hui, je te ressors un album/BD qui reflète un peu cet état d’esprit, un truc que j’ai lu il y a un bail, que j’ai vu passer sur Insta, et que je pensais avoir chroniqué mais en fait non (si ça se trouve, je suis juste un boulet qui ne sait pas utiliser la fonction « rechercher » de son blog). Dans le doute…

Sarakontkoi ?
Cœur de Pierre, c’est l’histoire d’une petite amoureuse. Amoureuse d’un petit homme triste et insensible. Jour après jour, elle offre un pétale de son cœur d’artichaut au petit bonhomme triste. Elle essaie de le réparer, de lui apprendre à aimer. De tout lui donner. Mais arrive le jour où elle n’a plus de pétale à donner, et son petit cœur d’artichaut a été effeuillé en vain…

Tenpenskoi ?
De mémoire, il me semble que c’est Chéri qui m’a offert cette BD il y a quelques années, parce qu’il savait que j’affectionnais ce genre de graphismes. Et franchement, il a eu tellement raison ! J’aime ! L’utilisation des couleurs et de la lumière, les traits naïfs qui exacerbent les contrastes entre ce que ressentent nos petits personnages les uns pour les autres.

C’est une histoire universelle, le syndrome de l’infirmière, si on veut casser la poésie. C’est-à-dire la propension à s’attacher aux personnes que l’on croit pouvoir guérir/changer/sortir d’une situation (vachement pas poétique). S’attacher aux mauvaises personnes, c’est le pitch de départ d’un million d’histoires d’amour qu’on nous sert aujourd’hui en littérature sentimentale. Mais là, ça va plus loin. C’est le : « Et après, si ça ne fonctionne pas ? Si on a tout donné ? S’il ne nous reste rien ? » Je vous rassure, on ne reste pas sur ce constat…

Plein de poésie, très mélancolique et assez juste, il peut s’adresser aux adultes en pointant leurs travers sentimentaux avec la naïveté déconcertante d’un enfant.
J’ai adoré !

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Pour info :
éditions Delcourt, 32 pages, 9.95 EUR

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Un océan d’amour (Wilfrid Lupano / Grégory Panaccione)

Ami du jour, bonjour !

Il y a des jours ou un quelqu’un vient vers toi, et te tend un petit bout de trésor, comme un petit rayon de soleil dans ton vendredi. Ce fut le cas ce matin, une douce pensée de ma collègue Laure qui m’a prêté cet ouvrage.

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Sarakontkoi ?
Un vieux pêcheur breton tout rabougri et un peu grincheux se lève, comme tous les matins, et, après avoir avalé un petit déjeuner cuisiné avec amour par sa femme, se rend au travail.  Sur son petit bateau, avec son petit filet, il ne remonte pas grand chose. La journée s’annonce assez mal, pire encore lorsque l’hélice de son rafiot se prend dans les filets d’un bateau de pêche monstrueux. C’est le début d’une épopée pour lui, et pour sa femme, qui n’aura de cesse de le chercher…

Tenpenskoi ?
J’ai un peu de mal à trouver mes mots pour vous parler de cette merveille. Pour commencer, je dois préciser qu’il s’agit d’une BD muette. Ça veut dire qu’elle n’a aucune bulle, aucun cartouche. Tout passe par le dessin.

Et parlons-en de ce dessin : fin, doux, un peu onirique, très expressif. Le livre n’en est que plus beau. Et quand je vous dis beau, je ne parle pas que d’esthétique. L’histoire est belle. L’intention est belle. La conclusion est belle.

Et pour le coup, moi qui parlais de ma déception quant à la perception du couple de Fabcaro dans mon billet précédent, ici c’est tout le contraire. Quand un vieux couple se rend compte en perdant sa routine que c’est justement les petits gestes du quotidien qu’on ne voit pas, qui nous agacent parfois, qui nous manquent le plus.

Bref, c’est beau, c’est simple, et ça se passe de mots. Merci Laure 🙂

Pour info :
éditions Delcourt, collection Mirages, 224 pages, 25,50€

Publié dans BD, Bouquinade

Moins qu’hier (plus que demain) (Fabcaro)

Ami du jour, bonjour !

Je te délaisse un peu en ce moment, j’en suis désolée. Je pense bien que tu n’en es pas encore au point où tu pleures l’absence de billet le soir dans ton lit, mais peut-être qu’avant-hier, tu t’es dit « tiens, depuis un moment, elle poste un peu moins ». Et tu as raison. En ce moment, je forme un nouveau collègue, donc j’ai moins de temps. Et j’ai repris la langue des signes. Donc encore moins de temps. Dans un cas comme dans l’autre, je suis ravie de ce que je fais, mais forcément, je suis moins disponible pour mon cher blog, et pour toi, lecteur.

Bref, je vais te causer d’une BD que je viens de terminer et qui me laisse un goût de… de gné.

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Sarakontkoi ?
Plein de petites histoires, un dénominateur commun : le couple. Mais le couple sous ses pires aspects. Le mensonge, le chantage, les enfants, le sexe, l’ennui, le fantasme de l’impossible : rien ne va plus.

Tenpenskoi ?
Déjà, ça s’avale très vite. Chaque « intrusion » dans la vie des couples ne fait qu’une planche (une page). Et heureusement. Le dessin est simpliste, mais j’aime bien ces touches de couleur. Je n’ai pas détesté.

Ensuite, mis à part deux ou trois planches improbables où j’ai franchement ri… bah j’y suis restée totalement insensible. Laissez-moi vous faire part d’une réflexion que je retiens depuis un certain temps: je n’aime pas cette stigmatisation de l’ordinaire qui semble gagner les bien-pensants. Le couple, ce n’est pas juste chiant. Ce n’est pas juste une prison, et ce ne sont pas que des compromis. Les enfants ne sont pas juste un purgatoire.

Après, tu me diras : « oui, mais c’est juste que tu te sens visée ». Effectivement, je me sens visée. Je suis mariée, et je suis heureuse. Ca ne fait pas de moi, ou de mon époux, quelqu’un de naïf, de moins intéressant, ou pire ; ça ne fait pas de moi un mouton. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, à moins d’être dans le rejet du conventionnel, on n’a que peu d’intérêt.

Je ne me bats pas contre le monde entier pour défendre mon orientation sexuelle, ma sexualité, ma couleur de peau, mais ça ne fait pas de moi quelqu’un de fourbe, de menteur ou de plat. Et c’est ce que ce livre m’a fait ressentir : que le couple conventionnel était chiant et risible. Ca m’a fait de la peine. Pas pour moi, parce que je n’ai rien à prouver. Mais pour ceux qui se laissent envahir par le cynisme au point d’oublier tout ce que la vie offre de positif. Et l’amour en fait partie. Du coup, je l’ai offert à Chéri pour nos 3 ans de mariage.

Ceci dit, j’ai lu le résumé de Zaï Zaï Zaï Zaï, et franchement, il me fait un peu plus envie. Donc je ne suis pas hermétique à l’auteur.

Pour finir, je partage avec vous une vidéo de la chaîne Et tout le monde s’en fout, qui résume très bien mon opinion sur le couple.

Pour info :
Glénat, collection GlénAAARG !, 64 pages, 12,75€

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Polina (Bastien Vives)

Amis du jour, bonjour !

Je ne m’arrête pas en si bon chemin, parce que je vais vous causer d’une BD de Bastien Vives. Je tiens cependant à mettre les choses au clair (je crois qu’on appelle ça un disclaimer dans le jargon) : Bastien Vives est au cœur d’un scandale sur les réseaux sociaux, et il n’est pas question ici de démentir ni de soutenir qui ou quoi que ce soit. Il s’agit d’un livre que j’ai lu, et que je vais vous présenter. Merci.

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Sarakontkoi ?
Polina est toute jeune lorsqu’elle intègre une prestigieuse école de danse classique en Russie. Son professeur, qui déplore sa raideur, décèle pourtant en elle un vrai talent. Au fur et à mesure de sa progression, et de son parcours, ce sont les écoles de la rigueur et de l’émotion qui vont se vouer un combat féroce pour les talents de la belle. Un plongeon sur les parquets des salles de classe et les coulisses de ces créatures qui nous font rêver.

Tenpenskoi ?
C’est intéressant de connaître les dessous de ce milieu très particulier qu’est la danse. On saute d’événement en événement, pour suivre la montée de l’étoile Polina. L’affection et l’admiration qu’elle porte à un professeur qui pourtant se montre d’une odieuse sévérité me rappelle un peu l’admiration que j’avais pour les profs que mes camarades aimaient le moins (parce qu’ils les craignaient). C’est un cheminement, une résilience face aux épreuves émotionnelles, physiques, aux déconvenues professionnelles. J’aime bien Polina.

C’est compliqué à expliquer. Bastien Vives fait partie de ces illustrateurs dont les œuvres me déchirent. Sur certaines vignettes, je me dis « ouah la vache, en 2 traits, il dépeint une telle grâce », tandis que sur quelques autres, je me dit « pouah, le trait est grossier et un peu dégueu quand même, il s’est pas fait chier ». Ici, il n’a pas travaillé sur le détail, mais sur une espèce d’impression de légèreté. Du trait, des ombres, et un certain minimalisme. J’oscille entre le « ouah » et le « il se fout de moi, à ce prix-la ». Et c’est peut-être tout le talent de Bastien Vives.

Pour info :
éditions Casterman, 210 pages, 20 €

 

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L’anniversaire de Kim Jong-Il (Aurélien Ducoudray / Mélanie Allag)

Ami du jour, bonjour !

Tu la sens cette fin de semaine qui arrive ? Est-ce que tu entends les oiseaux chanter, est-ce que tu sens la brise fraîche du matin, qui malheureusement ne s’attarde pas ? Est-ce que tu savoures ce moment où tu quittes le boulot pour rentrer chez toi, pour ne pas être accueilli par ton chat parce qu’il a la flemme de bouger ses papattes du canap’, poser tes pieds nus gonflés sur le carrelage frais et aller faire ta vaisselle avant d’embrayer sur la popote du soir (et du lendemain parfois) ? Doux Jesus, cette phrase était interminable !

Bref, si tu vois de quoi je veux parler (et même si ce n’est pas le cas) je te propose de t’accrocher à tes petits bonheurs, parce que ce soir, on rend visite à une population nettement moins bien lotie que toi et moi…

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Sarakontkoi ?
Jun Sang a 8 ans, il vit en Corée du Nord. Il est né le même jour que Kim Jong-Il, son héros, le cher guide de sa patrie. Il fait partie d’une brigade de gamins dévoués corps et âme à ce « cher guide ». Dans son pays, en période de pénurie, la télévision explique que ce n’est pas bon de trop manger, qu’il faut réduire le nombre de repas à un par jour. Dans son pays, après l’école, c’est aux champs qu’il va travailler. Dans son pays, on hait ces chiens d’Américains et de Coréens du Sud. Comment remettre en cause la ferveur et l’amour d’un enfant pour son dirigeant lorsque la chance de fuir le pays se présente ? Jun Sang ne pensait pas qu’il vivait dans l’antichambre de l’enfer, et que ça n’était que le début.

Tenpenskoi ?
Bon, je vais être honnête : moi je n’y connais rien en géopolitique, je sais que la Corée du Nord est une dictature, qu’il n’y fait pas bon vivre, parce que les têtes tombent selon le bon vouloir du parti. Je sais aussi qu’une fois l’an, on rejoue le jeu de la Terreur, en nous faisant croire que Coréens du Nord et Américains vont nous faire sauter la tête. À part ça, je ne m’étais jamais vraiment attardée sur le sujet. Pas jusqu’à ce que — je te le donne en mille — Lemon June en parle sur sa chaîne Youtube (d’ailleurs, si tu veux voir sa vidéo, clique ici).

Je me souviens de l’état dans lequel l’avait mise sa lecture. Elle en était vraiment retournée. Moi, ça m’a touchée. Je veux dire qu’elle ne fait que mettre des mots et des images sur ce qu’on sait déjà plus ou moins. La Corée du Nord est une prison. Pas seulement parce qu’elle contrôle les mouvements de sa population (il faut une autorisation pour aller à la campagne… en Corée du Nord), mais aussi pour l’esprit ! La question qui me vient en tête, c’est combien de Coréens du Nord sont endoctrinés, persuadés que leur leader est un héros et que le reste du monde est pourri ? Et combien sont simplement terrifiés au point de rester dans les rangs et de ne rien dire ?

Le dessin, simple, enfantin, tantôt coloré, tantôt en noir et blanc, contraste avec le thème grave de la BD, qui rend abordable pour le premier venu (moins, en l’occurrence) ce sujet pourtant très douloureux à appréhender. Parce que oui, ça existe encore. Et oui, on se sent impuissant. On est loin de docus comme Nuit et Brouillard qui te crache à la gueule toute l’horreur du monde. Ici, l’horreur est de voir tout ce qui peut se passer à travers les yeux innocents mais, avouons-le, endoctrinés, d’un gamin. Un gamin qui aime son quotidien, chérit sa patrie, et pourrait même renier son père Sud-Coréen. Là, tu te dis : au moins, je sais.

Bref, si tu te sens concerné par la question Nord Coréenne, ou si tu veux juste lire quelque chose de différent et de vrai, je te propose L’Anniversaire de Kim Jong-Il, c’est un bon début.

Pour info :
éditions Delcourt, collection Mirages, 128 pages, 17,95€

Publié dans BD, Bouquinade

Vingt-trois prostituées (Chester Brown)

Ami du jour, bonjour !

Tu vois, je me dis que la vie est super bien fichue tout de même. Hier, je te parle de BD, de sa place dans le monde du livre, et aujourd’hui, POUF, je te cause d’une BD qui vient justement illustrer mon propos ! Magique…

Celle-ci, c’est sur les conseils de Pénélope Bagieu, via ses chroniques de BD pour Madmoizelle, que je l’ai empruntée à la médiathèque. Parce que, franchement, je ne pense pas que je me serais arrêtée dessus. Et ça aurait été une erreur (rho, flûte, je spoile mon propre billet).

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Sarakontkoi ?
Chester Brown partage avec nous sa vision du couple, du mariage, du sexe, mais surtout, son point de vue sur la prostitution. Cet ouvrage est totalement autobiographique. Après sa rupture avec sa petite amie, Chester se rend compte qu’il ne souhaite pas de relation de couple. Mais si ce ne sont pas les relations amoureuses qui lui manquent, ce sont bien les relations sexuelles. Il ne souhaite pas s’engager émotionnellement, mais ne peut et ne veut pas renier ce besoin. Une solution s’offre alors à lui : faire appel à des professionnelles du sexe tarifé.

Tenpenskoi ?
La prostitution est un sujet qui divise. Et c’est un vaste sujet, j’ai peur de ne pas pouvoir dire tout ce que j’ai à te dire. Tu as beau avoir l’esprit ouvert, souvent, tu tiques. Chester Brown, ici, nous dépeint une simple réalité, un fait : il est seul, il ne souhaite pas s’engager. Il n’est pas pervers, simplement, le contact charnel lui manque. Est-il répréhensible de pouvoir, légalement (Chester vit au Canada), contre une rémunération correcte, assouvir cette envie ? Oui, parce que, au Canada, il faut savoir que la prostitution est légale (dans certaines conditions qu’il explique très bien).

C’est un ouvrage fort, qui ne crie pas au visage de ses lecteurs.

  • Le trait est simple, les visages peu expressifs : Chester Brown nous présente une froide réalité : la sienne, celle d’un homme pragmatique, droit dans ses bottes, et ça, j’ai aimé ;
  • le respect des femmes, de ses amis, pondère le sujet. Ces femmes, on ne voit pas leur visage, et on ne sait de leur vie que ce qui a un rapport avec la prostitution. Le secret est respecté ;
  • à la fin du livre, Brown nous propose des appendices, qui clarifient son propos, et qui éclairent notre lecture (loi, morale, opinion, etc.).

Je partage personnellement son point de vue qui consiste à dire que si une femme souhaite faire commerce de son corps, l’en empêcher va à l’encontre de ses droits fondamentaux. En dehors de la morale puritaine de ses détracteurs, la prostituée ne fait de mal à personne, et la stigmatiser ne fait que renforcer son insécurité, parce qu’elle se prive de l’aide des forces de l’ordre, de celle de ses proches, par peur des remontrances. Accompagner plutôt que d’accuser et de punir, c’est le B-A BA de ce qu’on apprend depuis tout petits.

Seule ombre au tableau : exposer un point de vue, je suis d’accord (d’autant que j’en partage certains aspects). Mais faire de son opinion une vérité universelle en induisant que ceux qui pensent comme tout le monde ont tort, je dis stop. Ce n’est pas aprce que Chester Brown ne croit pas en la monogamie et en l’institution du Mariage qu’il doit affirmer que l’homme n’est absolument pas fait pour ça. Lui ne l’est peut-être pas, mais si moi je choisis de vivre selon ce principe en mon âme et conscience, je ne suis pas pour autant un faible mouton de la morale.

Enfin, si le sujet t’intéresse (et même si tu souhaites ouvrir ton esprit), je te recommande grandement cette BD. D’ailleurs, je te mets la vidéo de Pénélope, histoire de…

Pour info :
Cornelius Editions, 280 pages, 25,50€ chez ton libraire (gratuit dans la médiathèque)