Publié dans Bouquinade, Roman

Esprit d’hiver (Laura Kasischke)

Amis du jour, bonjour !

Je me suis dit que la saison était parfaite pour prendre un petit coup de froid. Froid au bout des doigts, mais froid dans le dos aussi !

Le Pitch :
Réveil en urgence pour Holly en ce matin de Noël neigeux. Peu désireuse de recevoir ses convives, elle reste seule à la maison pour préparer le repas avec sa fille adoptive, d’origine russe, pendant que son époux va chercher ses parents à l’aéroport. Cette matinée festive se transforme en huis clos lorsque les routes deviennent impraticables. Alors une idée hante Holly : il y a 12 ans, quelque chose l’a suivie depuis la Russie jusque chez elle…

Mon avis :
De base, ce genre de littérature contemporaine d’ambiance, c’est pas vraiment mon truc. C’est toujours très contemplatif. Mais j’en ai entendu parler sur des chaînes Youtube que j’apprécie beaucoup, alors je l’ai noté dans un coin de ma tête. Et puis, en rangeant le rayon litté à la librairie, je me rends compte qu’il est là. Il n’est pas très épais, je suis intriguée, j’ai un peu de temps à perdre (c’est faux) alors je m’y jette.

Au début, c’est chelou. Il y a comme un malaise. Holly est insipide, elle vieillit, elle le sait. Elle aime son mari, et sa fille, mais elle a tendance à ne pas être entendue d’eux. Ses beaux-parents lui sont antipathiques et en plus, elle doit recevoir tout ce beau monde ainsi que des amis de son mari (qu’elle ne porte pas dans son cœur). Bref, c’est un personnage geignard qu’on a très envie de secouer, très fade à côté de sa fille de 15-16 ans qui est d’une beauté froide et d’un caractère guère plus chaud face à sa mère. Cette fille qu’elle a adoptée avec son mari en Russie donc. Le rêve de sa vie devenu réalité. Enfermée dans sa maison, elle ressasse les souvenirs. Des souvenirs de plus en plus étranges. Des pensées culpabilisantes, qu’elle avait enfouies jusqu’à présent.

Et là, tu la sens l’ambiance poisseuse ? Les remarques de plus en plus gênantes de sa fille, ses apparitions silencieuses, ses changements de tenue intempestifs, ses sauts d’humeur. Et Holly qui subit, qui questionne, qui raisonne. Holly qui cherche sa place de mère, de femme. C’est étrange, c’est étouffant et froid. Et ça m’a beaucoup fait réfléchir au type de famille qu’est devenue celle de Holly après l’adoption (même si ce n’est pas vraiment le sujet). Le roman me colle à la peau, j’y repense souvent. Et cette fin… Bref, un contre-roman de Noël intelligemment écrit et construit, que je vous conseille de découvrir si mon retour a éveillé votre curiosité.

Pour info :
éditions Le Livre de Poche, trad. de Aurélie Tronchet, 312 pages, 7.90€

Publié dans BD, Bouquinade

L’Adoption (Zidrou / Monin)

Ami du jour, bonjour !

Parlons peu, parlons bien, parlons BD. Encore une fois, c’est une lecture que j’ai évoquée sur Instagram, mais que je n’avais pas pris le temps de chroniquer, et vous savez à quel point la chronique écrite est importante pour moi (et si ce n’était pas le cas, c’est chose faite). J’ai acheté la BD en question en janvier je crois, alors que notre projet d’adoption n’avait encore que des contours flous. J’ai vu ce titre, je me suis dit « c’est un signe ». Et j’ai attendu 6 mois pour la lire…

Sarakontkoi ?
Qinaya a 4 ans, elle vient du Pérou, et a été adoptée par un couple français, Lynette et Alain. Alors que ses parents la ramènent dans sa nouvelle maison, cette adoption suscite chez les proches des réactions très différentes : joie, bonheur, amour, indifférence, une touche de condescendance pour ces parents qui n’ont pas pu l’être naturellement. Mais la réaction la plus vive vient du père d’Alain, Gabriel, qui trouve tout ça bien ridicule. Petit à petit, il va pourtant s’attacher à la petite Qinaya, jusqu’au drame qui la lui arrachera…

Tenpenskoi ?
Je suis désolée, j’ai un peu divulgaché la fin du tome 1 parce que j’ai l’édition intégrale de la BD (T1 et 2). J’ai lu pas mal de réactions contradictoire sur cette BD, et une bonne partie des lecteurs n’ont pas aimé la seconde partie (donc le T2). C’est vrai qu’on s’attend à suivre l’histoire d’une famille qui se trouve, qui se construit. Mais la BD fait le choix de vous confronter aux réalités parfois très difficiles de l’adoption. L’intrusion constante des gens et de leur avis dans votre vie, le jugement, et parfois la pitié. Le refus de vos proches de considérer l’enfant comme faisant partie de votre famille. Et surtout, les graves conséquences de démarches bâclées à l’étranger. Bref, on vous montre aussi que le plus compliqué, ce n’est pas tellement d’obtenir son agrément, c’est ce qui vient après.

Cette deuxième partie, que beaucoup ont critiquée, je l’ai trouvé juste et réaliste. Ce père trop absent qui a reporté tout l’amour qu’il aurait dû donner son fils sur sa nouvelle petite fille. Sa colère lorsque la négligence de son fils lui a enlevé Qinaya. Mais surtout une prise de conscience : celle que l’enfant qui a besoin de lui n’est pas celui qui vit à l’autre bout du monde, mais celui qui paie aujourd’hui presque de sa vie les choix qu’il a faits. C’est un éveil, une ouverture, une prise de conscience. J’ai trouvé cette seconde partie sincère et touchante. Quant à la première partie, si j’ai été amusée des réactions des proches de Lynette et Alain, j’ai parfois fulminé face aux commentaires indiscrets. J’ai vu ces parents un peu perdus, et je me suis dit : « adoption ou pas, c’est sans doute ça, être parent… se rendre compte qu’en fait, on ne sait rien »… Bref, une merveilleuse lecture très réaliste, loin des contes de fée, et plus proche de la réalité de cet acte fort qu’est l’adoption.

Un mot sur le dessin, ces douces aquarelles, colorée, fines, qui donnent au propos toute sa force… c’est un régal !

Pour info :
éditions Bamboo, collection Grand Angle, 152 pages, 24.90€