Publié dans Le mot du jour, Madame Je-Sais-Tout

Le mot du jour : pétrichor

Ami du jour, bonjour !

Cessez donc de vous en faire, je ne laisse tomber aucune de mes catégories. Parfois, elles passent à l’as un certain temps, et puis elle reviennent. C’est le cas du mot du jour.

Le mot du jour : pétrichor.

Il aurait été tout à fait de saison cet été puisque le petrichor (sans accent ici car tiré de l’anglais) désigne le liquide huileux que produisent les plantes lors des fortes chaleurs pour se protéger et protéger leurs graines. Ce liquide est ensuite absorbé par les sols argileux et rocheux. Du grec perta (la pierre) et ichor (le sang), ce mot a été créé en 1964 par Isabel Joy Bear et Roderick G. Thomas dans leur article « Nature of argillaceous odour » (magazine Nature de mars 1964).

Et c’est là que ça devient intéressant. Lorsqu’il commence à pleuvoir après ces fortes chaleurs, une odeur très particulière et fugace (puisqu’elle dure peu) se dégage de la terre. Le pétrichor désigne également cette odeur (que j’aime particlièrement). Il aurait été dommage de quitter les canicules estivales sans leur faire un petit clin d’œil !

 

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La pensée qui panse #23

Salut cher lecteur de Derrière mes Binocles !

Aujourd’hui, j’ai décidé de ne pas te parler de lecture, de mot bizarre ou de FIV. J’ai plutôt envie de te dire ce qui me passe par la tête, un billet d’humeur quoi.

D’où est-ce que ça vient ? Figure-toi qu’hier soir, quand on s’est couchés Chéri et moi, Chéri a bien vu qu’il y avait un truc qui n’allait pas. Un truc qui me rongeait de dedans, mais dont je ne parlais pas (ce qui est très rare, vu les flots de paroles dont j’abreuve mon auditoire, volontaire ou non, l’auditoire). Il m’a dit « en ce moment, je comprends pas, tu vois que le noir ». Et là, tout est sorti.

Je lui ai dit à quel point j’étais en colère, et triste, et à quel point je me sentais impuissante devant le grand désastre qu’est l’humanité. Ne monte pas sur tes grands chevaux genre « ouais, y’a des belles choses, y’a des gens qui se battent, étou étou ». C’est ce qu’a commencé à me dire Chéri. Mais ça ne marche plus. Pour un truc bien, t’en as cent qui merdent.

Et d’un coup, je me suis rendu compte de ce qui m’attristait vraiment. C’est que toutes ces personnes bien pensantes, qui agissent bien, qui essaient de changer les choses, ne font que pointer du doigt ce que je fais mal. À quel point mon Nutella tue les forêts, mes serviettes hygiéniques et mes sacs en plastique polluent les océans, à quel point mon étroitesse d’esprit m’empêche de voir la différence chez l’Autre. Je me sens rabaissée, infantilisée, je ne vois qu’une chose : on me fait la leçon parce que je ne suis, dans les yeux du bien pensant, qu’une merde égoïste.

Ma proposition : au lieu de me montrer ce que je fais mal, montre-moi (et non explique-moi, c’est trop facile sinon) comment je peux faire bien.

Montre à celui qui pollue comment réparer. Montre à celui qui utilise un sac en plastique comment coudre un sac en tissu (ou où se le procurer). Donne à celui qui bouffe son Nutella ta recette personnelle pour en fabriquer. Accompagne le raciste ou l’homophobe. Ou tout bêtement, partage ton expérience de cadre en reconversion ès parmaculture, femme ou mère célibataire / avortée / déplorée, homme en dépression, ado paumé, spécialiste du compost, transgenre assumé (ou non). Parce que les gens, en fait, ils sont aussi paumés que tu l’as été à tes débuts, et ils pourraient vraiment profiter de ton expérience et de tes conseils. Bref, fais tourner mec/meuf.

J’espère que c’est ce que je fais à mon échelle. Maladroitement encore, c’est vrai. Parce qu’au fond, on est tous des sales cons d’égoïstes, ni pires, ni meilleurs les uns que les autres. On est juste pas obligés de se l’envoyer par la tronche. Parce qu’après, c’est comme les gosses : on se persuade qu’on ne vaut pas mieux, et on n’avance pas. C’est mieux si on met toute cette énergie au profit de ce dont on s’est volontairement coupés depuis longtemps : l’écosystème dans lequel on vit, le cercle vertueux de la Vie. Et ça, c’est Rafiki qui le dit.

Et si t’es OK, bah fais passer le mot, chez tes amis, tes parents, sur tes réseaux sociaux toussa toussa 🙂

Publié dans Le mot du jour, Madame Je-Sais-Tout

Le mot du jour : apocalypse

Ami du jour, bonjour !

Je t’en ai parlé hier dans mon billet sur ma lecture de Good Omens, aujourd’hui, on va causer de fin du monde… ou pas !

Le mot du jour : apocalypse.

La fin des haricots, du monde, des temps, le jugement dernier, le Ragnarök… bref, tout ça pour dire que quand tu entends apocalypse, tu te dis que t’es cuit. Sauf que…

Apocalypse, si tu reprends sa racine grecque, ça ne veut pas dire « destruction », et pas tout à fait « révélation de Dieu », ça c’est une extrapolation due à l’utilisation du mot en contexte religieux (créé dans un contexte religieux ?). Le mot en lui-même veut dire « ce qui révèle » de la racine grecque kalúptô (cacher, couvrir), précédé de apo– (préfixe qui indique la privation) : donc, dé-cacher, découvrir. Fun fact : le nom de la nymphe Calypso, qui a retenu Ulysse chez elle dans l’Odyssée, vient également de cette racine (Calypso : celle qui couvre, qui enveloppe).

Le livre de L’Apocalypse selon Saint-Jean est appelé Le Livre de la Révélation (CQFD). Dans ce livre, Jésus fait à Jean des révélations sur « le sens de son époque » et la manière dont le peuple de Dieu sera sauvé (prétendument dans un combat entre Dieu et Satan). Je ne suis personnellement pas la mieux placée pour causer de religion, et son histoire m’échappe. Mais ce que je peux dire, c’est qu’on a connoté le terme de notions de violence et de destruction qu’il n’avait pas à la base.

Juste pour nuancer, la prochaine fois que vous regarderez Apocalypse Now 🙂

 

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Sors ta science #17

Ami du jour, bonjour !

Ce week-end (et une bonne partie de la semaine d’ailleurs), j’étais avec mon cher et tendre à la campagne, pour aider mes parents à refaire toute la cuisine de notre maison de famille. Bon, refaire la cuisine, c’est un euphémisme. Faire la cuisine. Passer les alim’ d’eau, l’électricité, les évacuations, faire le placo, refaire le sol, monter et poser les meubles. Bref, toussa toussa. Pourquoi je te raconte tout ça ? Parce que ma maman avait acheté des couverts en bois et de la vaisselle jetable en plastique (bah ouais, pas de cuisine, c’est pique-nique) dans l’espoir de pouvoir recycler. Mais, le saviez-tu, tout ne se recycle pas. « Mais y’a le petit logo ! » a dit ma maman. « Chez nous, c’est trop bien, tout se recycle » a ajouté ma cousine. Que nenni, jeune padawan. Il existe multitude de symboles qui, bien qu’ayant trait au tri ou la vigilance du consommateur sur le traitement des déchets, ne signifie pas que tout se recycle.

Alors, tu viens ? Je vais t’expliquer 2-3 trucs.

point vertLe premier symbole, le point vert. Le truc le moins bien compris de tous les temps. Toi, en tant que consommateur, quand tu vois ça, tu te dis que l’emballage se recycle. C’est vert, c’est des flèches qui tournent. Et c’est FAUX. Ce logo signifie simplement que la firme qui a produit cet emballage a payé une redevance à Eco Emballage. De l’argent contre une bonne conscience. Enfin, c’est mon avis. Mais il n’est ni issu de produits recyclés, ni recyclable pour autant.
Je suis un peu excessive, parce qu’Eco Emballage travaille à la communication autour du recyclage, finance des projets visant à augmenter la quantité d’emballage recyclés auprès des acteurs publics et privés, etc. Je te laisse jeter un œil sur le site si tu es intéressé.

moebiusEnsuite, parlons du ruban de Möbius. Là encore, c’est joli, c’est vert (mais pas toujours), ce sont de petites flèches qui forment un triangle. Mais ça ne veut toujours pas dire que ta commune l’acceptera dans la poubelle jaune. Le produit est recyclable techniquement, mais pas nécessairement traité dans ton centre de traitement. C’est assez peu spécifique en fait, et en tant que consommateur, ça te donne assez peu d’infos.

moebius+
Si le ruban est noir et affiche un pourcentage, la signification est légèrement différente. Le pourcentage indique la quantité de matière recyclée présente dans l’emballage.

PETVoilà le symbole que tu dois chercher sur les emballages en plastique ! Il indique la composition de l’emballage. À l’intérieur (ou à côté, selon la taille du logo) figure un chiffre compris entre 1 et 7 qui identifie le matériau. En dessous, tu trouveras la nomenclature du plastique en question. Je vais juste t’indiquer les plastiques recyclables, les autres, tu les trouveras ici.
1 PET (Polyéthylène Téréphtalate) : utilisé dans les bouteilles d’eau, de vinaigre et d’huile, etc., de certaines barquettes et j’en passe. Ca, dans la poubelle jaune.
2 PE HD (Polyéthylène Haute Densité) : utilisé dans les bidons de lessive et de produits ménagers, les bouteilles de shampooing, les plastiques assez rigides. Idem, poubelle jaune.
5 PP (Polypropylène) : utilisé dans la vaisselle en plastique, les gourdes, les emballages de beurre, etc. Là, c’est plus compliqué, attention, ça dépendra de ta commune. À Paris, par exemple, tu peux le recycler. Bonne nouvelle les Clermontois, Clermont Auvergne Métropole recycle une partie du PP, mais pas tout, notamment les assiettes en plastique (jette un œil sur leur site si tu as un doute). Si t’es pas de Clermont, Google est ton ami… ah non, Ecosia, restons verts. Ou ta communauté de commune. Ou ta commune.

Pour le reste, c’est un peu moins compliqué.

verre recyclable
Là, il s’agit de verre, et le verre est plus facile à trier, parce qu’on le trie depuis plus longtemps, déjà, et parce qu’il y a moins de sortes de verres. En Allemagne, on trie encore les verres colorés et les verres blancs. Pas en France. Je te laisse jeter un coup d’œil ici, c’est assez intéressant et ça peut répondre à quelques questions. En gros, tout le verre ne se recycle pas. Ton saladier en verre, ta tasse en verre, tes assiettes ou ton plat Pyrex ne se recyclent pas. Tout le reste, hop, pas dans les déchets ménagers, mais dans le bac à verre de ta commune ! Mieux sans couvercle ni bouchon, mais le tri sera fait de toute façon.  Cherche le petit logo 🙂

L’acier et l’aluminum se recyclent également. Tu trouveras ces logos sur les emballages. Donc là encore, c’est poubelle jaune !

Tu vas trouver un million d’autres logos, qui vont te paumer, parce qu’ils veulent dire tout et son contraire. En voici quelques exemples, certains sont importants, d’autres franchement, à part donner bonne conscience au producteur, on pourrait s’en passer.

tidymantriman

Tidyman et Triman t’indiquent juste qu’il faut jeter dans une poubelle et pas par terre, et que si c’est possible, tu dois trier.

poubelledechetterie

Ici, on t’indique de ne pas jeter dans la poubelle pour le premier picto, et de déposer en déchetterie pour le second.

Je t’épargne les forêts gérées durablement, et autres Bio, petites feuilles vertes, etc. Sache qu’un emballage est rarement bon. On fait au mieux, mais le tri, la valorisation des déchets, reste un souci majeur. Ceci dit, des projets voient le jour, des initiatives qui repoussent les limites du recyclage.

Le mot de la fin : les sacs plastique jetables ne se recyclent pas. Quant aux sacs en fécule de maïs qu’on voit fleurir un peu partout parce qu’ils sont « biodégradables », leur production nécessite une quantité incroyable d’eau. Alors demande à ta maman / mamie / copine de te faire des sac en tissu pour aller faire tes courses. Ou bien fais-le toi-même, ça marche aussi, si tu sais coudre 🙂 (Petite info, je sais coudre, alors si tu en veux, demande-moi).

Et pour finir, un petit exercice pratique : où vont ces emballages ?
N’oublie pas, le site Consignes de tri est ton ami !

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Sur ce, sincères poutous, prends soin de toi, et jette un œil à tes emballages 🙂

 

 

Publié dans La pensée qui panse, Madame Je-Sais-Tout

La pensée qui panse #22

Ami du jour, bonjour !

Dernièrement, j’ai traversé une période pas jolie jolie. Des choses qui n’allaient pas. Ou bien moi, tout simplement, qui ne voyait que ça. Toujours est-il que je me suis extirpée tant bien que mal de cette merde, sous les yeux inquiets de mon adoré, en écoutant des choses et des personnes qui font du bien à la tête. Qui parlent d’amour de soi, de confiance et j’en passe. Bref. Parmi ces personnes se trouve l’acteur et comédien Zachary Levi, que tu as peut-être vu dernièrement dans le film Shazam !

Lors d’un échange entre Zachary avec Jay Shetty (dont je te recommande les vidéos si tu es anglophone) sur la santé mentale, mon oreille a été accrochée par une citation. En voici la retranscription :

On n’arrête pas de jouer parce qu’on vieillit. On vieillit parce qu’on arrête de jouer.
(We don’t stop playing because we get old. We get old because we stop playing.)

Ce sont des mots empruntés à Oliver Wendell Holmes, écrivain, médecin, essayiste et poète américain du XIXe. Je les aime beaucoup. Jay Shetty appuie sur le fait que, quoi que l’on entende par « jouer », il est important de garder des yeux d’enfant, et non de se conduire comme un enfant. Voir le monde simplement, être soi, et non ce qu’on attend de nous. Se faire confiance. Parce que jouer, c’est aussi ça. Être là où on est, pas demain, pas aujourd’hui, mais maintenant. Comme un enfant.

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Sors ta science #16

Ami du jour, bonjour !

Nan, la rubrique Sors ta science n’est pas morte non plus, juste un peu fatiguée… eh, c’est pas évident de te trouver des trucs sympas à te mettre sous la dent, toi lecteur assidu du blog, toi pointu des mots, des expressions ou simple curieux !

Bah là, la machine se remet en route, et je m’en vais te causer d’espace. Pas de mètre carré, mais de ciel, d’étoile, d’exploration. Aujourd’hui, je te cause voyage dans l’espace.

Bientôt va tomber un billet sur une petite BD prêtée par ma collègue et grande copine Laure (le teaser de ouf), et c’est dans cette BD que je suis tombée sur cette petite merveille.

Alors question :
– quel est le métier de Neil Armstrong ?
– quel est le métier de Thomas Pesquet ?
– quel est le métier de Sergueï Prokopiev ?
– quel est le métier de Liu Yang ?

Allez, tu as le droit de tricher. Et si tu as la curiosité de chercher sur Internet, tu verras que tous ces gens font le même métier : aller dans l’espace et faire des trucs scientifiques dans une station spatiale, en gros.

Mais sais-tu que, même s’ils font le même métier, ce métier n’a pas le même nom partout ?

En effet :
– Neil Armstrong est astronaute = américain
– Thomas Pesquet est spationaute = européen
Sergueï Prokopiev est cosmonaute = russe
Liu Yang est taikonaute = chinoise

Voilà, à présent, tu peux grave te faire mousser dans les discussions trop sérieuses entre collègues 🙂

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Le mot du jour : apophonie

Ami du jour, bonjour !

Tu l’auras remarqué, le J’ai testé pour vous n’est pas sorti, j’avais pas la foi cette semaine. Du coup, je ressors de la tombe une rubrique un peu laissée en friche. Alors sortez les bêches et les râteaux, on ressort le mot du jour !

Et pour bien recommencer, un mot bien sympa, que ça change pas ta vie si tu le connais, mais que tu peux faire le malin quand tu le sors.

Le mot du jour : apophonie.

Une apophonie, c’est une modification de timbre. Rien à voir avec la poste, mais avec les voyelles, lorsqu’elles changent d’un mot à son dérivé, pour passage du féminin au masculin, du singulier au pluriel, d’un temps à l’autre, ou d’un type de mot (verbe) à un autre (nom commun). Pour le moment, tu comprends pas grand-chose à ce que je te raconte.

Je te donne des exemples de changement de sonorité :
émail => émaux
je meurs => nous mourons
coordonner => coordinateur

Et j’en passe…

Quand j’étais en latin, on parlait d’apophonie de la voyelle intérieure. C’est à dire que quand on ajoute un préfixe à un mot, la voyelle passe de la première syllabe à la seconde par exemple. Et elle se referme. Un exemple : le verbe facio (je fais) devient conficio (j’exécute).

Tu sauras maintenant que ces petits changements d’un mot à l’autre d’une même racine porte un nom. Toi, t’en connais des apophonies ?

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Le mot du jour : météorisme

Ami du jour, bonjour !

Je me suis dit que, pour notre premier mot de l’année, je devais trouver un truc de circonstance. Je me suis penchée du côté du bonheur, des vœux et de toutes les bonnes pensées qu’on peut avoir en ce début d’année. Les bonnes résolutions, toussa toussa. Et puis, j’en ai trouvé un qui a fait mouche.

Le mot du jour : météorisme

Là, tu te dis : qu’est-ce que Smallville a à voir là-dedans ? (Smallville, l’enfance de Clark Kent, la série où tout tourne autour d’une pluie de météorites… nan ? Laisse tomber.) Rien à voir avec un corps céleste, bien que, s’il s’agit de mon père, ça pourrait bien t’envoyer en orbite.

Le météorisme désigne en fait un ballonnement, un gonflement de l’abdomen dû à des gaz intestinaux. Comment en vient-on du gaz au caillou qui tombe du ciel ? Bonne question. Météorisme vient du grec meteorizo, qui veut dire « lever en l’air » (action de lever, d’où enfler, gonfler). C’est la même racine que météore (du grec meteoros = qui est en l’air).

Donc, le jour où tu as des gaz, où tu es ballonné, bah maintenant tu pourras le dire élégamment.

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Sors ta science #15

Ami du jour, bonjour !

Me voici me voilà, de retour du Salon du Livre et de la Presse Jeunesse de Montreuil. Mon week-end fut mouvementé : non content d’avoir dépensé une certaine somme en bouquins, la fourrière a embarqué notre voiture. Obligés de poser un jour (lundi) parce que la fourrière est fermée le week-end et que j’ai 4 heures de route pour rentrer. Bref, on a récupéré la voiture, non sans avoir été délestés de 130 balles, et on attend l’amende. En attendant, je suis bien contente de retrouver mon poste et mes collègues (et c’est déjà pas mal).

Aujourd’hui, on va causer d’une expression que je n’avais jamais vraiment comprise avant de tomber sur le compte Instagram Sors de ta caverne. Johara m’a gentiment donné l’autorisation de reprendre son post, parce que, franchement… voilà. En gros, j’ai envie de lui piquer toutes ses publications (si tu vas sur son compte, tu comprendras pourquoi). Je t’ai donné l’adresse, mais interdiction de me laisser tomber hein !

Bref, aujourd’hui, on va savoir pourquoi on voit midi à notre porte.

Tu la connais la copine/sœur/maman/tata/boss (raye la mention inutile) qui n’est pas trop d’accord avec ton propos et te sort d’un air pincé : « chacun voit midi à sa porte ». Tu vois que de son côté, c’est pas vraiment top top. Mais c’est quoi cette foutue histoire de porte et de midi ?

Tu le sais, ni Charlemagne ni Louis XIV n’avaient de Swatch au poignet. Pas possible, l’heure se mesurait à l’époque avec un cadran solaire, placé en général devant la porte des habitations. Sauf que c’est pas l’instrument le plus précis du monde, et qu’entre mon midi et celui de mon voisin, bah c’est pas exactement la même chose. Tu vois midi à ta porte, ça veut dire que c’est ta façon de voir les choses, ton point de vue. (J’entends d’ici le « aaaaaaaaah »).

J’en ai entendus qui disaient : chacun voit 13h à sa porte. Ca marche avec toutes les heures cela dit. Sauf peut-être la nuit… bref, le voile est levé, je peux enfin, moi aussi, prendre cet air contrit, pincer mes lèvres et murmurer dans une hypocrite envie d’éviter le conflit : « oui, enfin, chacun voit midi à sa porte ».

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« Belle maman, vous… tu… »

Ami du jour, bonjour !

Vendredi, j’ai eu la bonne surprise de recevoir via Facebook une idée d’article, parce que là, je sèche. Non, je ne suis pas une machine. Te parler d’un bouquin, c’est évident, mais pour ce qui est des autres articles, ça vient selon l’inspiration. Alors j’aime bien recevoir ce genre de petit mot. Là, c’est ma collègue Fred qui m’a envoyé le podcast à l’origine de ce billet. Sankyou bôcou.

Aujourd’hui, tu l’auras compris, on va causer tutoiement / vouvoiement. Et pour commencer, je vais arrêter tout de suite le débat qui n’existe que dans ma caboche : on peut dire vouvoiement ET voussoiement. Les deux ont une origine assez ancienne, voussoiement était le plus logique (bah ouais, on écrit vous, pas vouv), mais vouvoiement étant le plus euphonique (celui qui sonne le mieux).

Ca, c’est fait. Maintenant, pourquoi on voussoie (ouais, j’ai envie de dire voussoyer) ? Non parce qu’on n’est qu’un dans notre tête, même si ce n’est pas évident pour tout le monde. On considère que le voussoiement viendrait de l’Empire Romain, environ 300 après ce bon vieux J.C. Diocletien était alors au pouvoir, et a divisé l’Empire en deux : l’Empire d’Orient, et l’Empire d’Occident. À la tête de chaque morceau, il y avait un Auguste (titre honorifique d’empereur en quelques sortes) et un Cesar pour l’assister. Ainsi, lorsqu’un zozo prenait la parole, il parlait pour tout le monde, et se désignait donc par le pronom nous. On lui répondait en lui disant vous. Là, tu te dis : « oui, mais Louis XIV il faisait pareil, et il était tout seul ! » Certes, mais notre cher Louis avait une fascination pour la Rome antique, en témoigne l’esthétique des statues et les représentations artistiques. Bref.

C’est donc une des explications probables du voussoiement. Toujours est-il que sous la dynastie carolingienne, le voussoiement devient systématique, comme dans presque toutes les langues européennes (certaines résistent encore et toujours à l’envahisseur).

Après la Révolution, les conventions de l’ancien Régime sont complètement désavouées et rejetées. On efface la hiérarchie, le tutoiement est obligatoire, sous peine de finir guillotiné. La distance entre les « castes » sociales n’existe plus.

Napoléon restaure le voussoiement, envers la noblesse d’abord, puis la bourgeoisie. Et le voussoiement cède à nouveau la place en mai 1968, alors qu’à nouveau, on cherche à gommer les frontières sociales.

Tu l’auras compris, le voussoiement est vu comme une marque de respect, mais surtout comme une marque hiérarchique. Ainsi est-il d’usage, lorsque l’on rencontre quelqu’un, de le voussoyer. Personnellement, je trouve ça extrêmement hypocrite. Si je dis : « je vous emmerde », je ne suis pas plus respectueuse que lorsque je tutoie mon interlocuteur. Pour moi, l’intention mise derrière le voussoiement ou le tutoiement est bien plus importante que la forme de discours.

Le « tu » que je te donne est une marque de connivence, de complicité. Tu partages peut-être les mêmes centres d’intérêt que moi, tu lis ou pas les mêmes livres, tu es d’accord ou pas avec ce que je raconte. Mais surtout, je refuse toute hiérarchie. Ce que je veux, c’est un partage. « Mais, nous sommes plusieurs », me diras-tu, « c’est un voussoiement de pluralité ». Mais je m’adresse à toi. Toi qui a ta compréhension de cet article, et de tous les autres. Je fais appel à l’individu derrière la masse, derrière l’écran. Un intervenant dans une émission disait en gros « voussoyer, c’est reconnaître la pluralité de chacun, et mettre une distance qui représente la civilisation ». Moi je réponds : « tutoyer, c’est reconnaître que nous sommes uniques et que nous avons tous notre degré de compréhension et d’implication ». Si tu me demandes de te vouvoyer, c’est toi qui mets de la distance, et non du respect, entre toi et moi 🙂

Aussi demande-je toujours aux personnes dont je me sens proche immédiatement de me tutoyer.

À ce sujet, je te propose un article fort sympathique, si tu as deux minutes :
http://www.seizeheurestreize.com/commentaire-politique/vouvoyer-nest-pas-une-marque-de-respect-de-lindividu/

Et le lien vers le podcast France Culture :
https://www.franceculture.fr/player/export-reecouter?content=7cc1d710-5a23-4ca2-88d7-6924e6094976&fbclid=IwAR0w5nimmRGkfGbcznNMMnXvNXMYRY2vfnlOXXI_MHuTYJGJgzNi8CRSOkY

Désolée, ce billet était un peu long. Merci d’être arrivé jusqu’ici !

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