What’s Not To Love (Emily Wibberley/Austin Siegemund-Broka)

Ami du jour, bonjour !

Il y a parfois quelques drôleries dans la vie. Comme recevoir un roman que tu n’étais pas censée recevoir, et que tu lis par erreur. Mais qu’est-ce qu’il est cool quand même ! Qu’à cela ne tienne, c’est un joli hasard.

Sarakontkoi ?
En vrai, ça commence comme commencent 80% des ennemies-to-lovers adolescents : ils se battent pour être majors de promo, et ils sont au coude à coude. Pour les départager, la Principale demande à Alison et Ethan de préparer ensemble la soirée des anciens élèves. Ils doivent tous les deux briller, mais un désaccord au journal du lycée risque de remettre les pendules à l’heure… ou de faire tourner les boussoles.

Tenpenskoi ?
Enfin une romance adolescente qui fait voler des papillons dans le ventre sans proposer de relation toxique ! Oui Alison et Ethan sont rivaux, mais il ne se détestent pas « parce qu’ils s’aiment ». D’ailleurs, Ethan le souligne : elle est trop intelligente pour aimer un garçon qui la traite mal, et lui n’est pas le genre minable qui est horrible avec une fille parce qu’il l’aime. Merci ! On lit certes une romance qui commence par une forte inimitié, où le désir naît dans un moment de colère, mais l’intelligence des personnages est mise au centre de cette relation. Ils ont les idées confuses, peur pour leur avenir, ils se cherchent et se découvrent assez semblables. Ça, c’est très cool.

Les auteurs ont pris soin de développer l’histoire personnelle d’Alison (merci !) : heureux accident tardif d’un couple assez âgé, bien établi, qui a vécu une belle vie, elle est aimée, encouragée, et même calmement remise à sa place. Un fossé la sépare de sa grande sœur, beaucoup plus âgée qu’elle, qui cherche pourtant à renouer avec elle, donnant lieu à des scènes touchantes. Sa meilleure amie, Dylan, bisexuelle, peine à se remettre de sa rupture avec son ex-copine, et saute sur la première occasion de replonger dans cette relation malsaine où elle ne s’épanouit pas. Bref, des problématiques d’adolescente. Et on excuse volontiers ces airs de caricature qu’elle emprunte (elle est TRÈS compétitive, TRÈS égocentrique, elle a TRÈS peur de l’échec) parce qu’ils servent ses relations avec son entourage.

Ni le style, ni la construction du roman ne révolutionnent le genre, mais il remplit la check-list de la romance, sans tomber dans ses pires clichés, ni dans la caricature du « je te blesse parce que je t’aime ». Les personnages, en dehors de leur rivalité, sont sains, et ça sonne beaucoup plus vrai. Bref, une lecture très sympa qui n’a pas encore de traduction française, mais si tu lis l’anglais, il n’a rien de très compliqué…

Pour info :
éditions Viking Books, 400 pages, entre 12 et19€ (ça dépend des plateformes !)

Publié dans Bouquinade, Litté de l'imaginaire (SF, Fantasy, Fantastique)

Suzanne Griotte et le parc aux limaces (Thibault Bérard/Clément Devaux)

Amis du jour, bonjour !

On en parle en définitive assez peu ici, mais il m’arrive de lire des romans pour les plus jeunes. Je n’y vais que rarement de moi-même, mais depuis que je reçois les publications de Gallimard Jeunesse (et quelques petites choses chez PKJ, mais chut), ça m’arrive de plus en plus souvent. Et puis parfois, ça fait mouche, ces histoires de limaces.

Sarakontkoi ?
Suzanne Griotte est vieille et méchante. Et comme toutes les vieilles-méchantes, elle déteste les enfants. Ça tombe bien, le diable lui propose un marché : contre l’âme d’Adèle Nectar, une gamine dont les seuls amis semblent être une bande de limaces, il lui redonnera son corps d’enfant. Adieu douleurs et solitude, rouler dans la farine la naïve Adèle devrait être un jeu d’enfant, non ?

Tenpenskoi ?
Je parle souvent des romans que je n’attendais pas. Typiquement, on y est. Je le reçois sans l’avoir demandé, c’est pas LA lecture qui me fait le plus envie, mais c’est court, j’ai pas le time, et c’est toujours un -1 dans ce que j’ose encore appeler ma PAL mais commence à faire concurrence à l’Empire State. Toutes les conditions sont réunies pour que je sois vraiment surprise. Et c’est le cas !

Ici, point de roman à couettes, comme j’aime à les appeler (ces romans qui dégoulinent de sirop et de bons sentiments genre « gna gna gna je suis un livre pour les enfant »). Les personnages de Suzanne et Adèle n’ont rien de très original : la vieille dame acariâtre et la petitoune innocente, c’est pas non plus la révolution au royaume des choux. Mais voilà, il y a les limaces, et ça, ça change tout. Les limaces, elles sont muettes, dénuées de tout sentiment, ce sont des pages blanches. Des pages blanches sur lesquelles écrivent Adèle et Suzanne, qui deviennent peu à peu meilleures copines, et se soignent l’une-l’autre.

J’ai trouvé la fin très jolie, sans être trop évidente, et oui, j’ai été fauchée par ce roman dont je n’attendais rien. Les illustrations ont, je l’avoue, un goût de nostalgie et me rappellent celles de Quentin Blake. Je le garde du coup précieusement en rayon et m’empresse de vous le conseiller pour un lectorat entre 7 et 9 ans, et pour vous, grands enfants qui avez un jour rêvé de construire un parc d’attraction pour limaces.

Pour info :
éditions Gallimard Jeunesse, 160 pages, 13.50€

La Magnifique (Anne-Laure Bondoux)

Ami du jour, bonjour !

J’ai reçu, il y a quelques temps, un colis de chez Univers Poche qui contenait pas mal de romans, dont un qui m’intriguait particulièrement parce que, sans en reconnaître le titre, j’étais persuadée de l’avoir déjà lu.

Sarakontkoi ?
Bella Rosa, fougueuse jeune fille d’une vingtaine d’années, est loin d’avoir la vie facile. Son père est un infirme porté sur la bouteille et violent, et comme si être une femme seule en plein Far West n’était pas suffisant, la nature l’a gratifiée d’une poitrine plus que généreuse. Lorsque les rumeurs d’une bataille approchent, c’est le signal qu’elle attendait. Elle charge son père sur son chariot, et part vendre sa camelote sur les routes, vers l’inconnu…

Tenpenskoi ?
Le fin mot de l’histoire, c’est que je l’avais effectivement déjà lu, ce roman, il y a plus de 10 ans à l’occasion d’une rencontre avec l’autrice. À l’époque, il portait un autre titre, Pépites, et était paru chez Bayard, donc en jeunesse.

On aime suivre Bella Rosa, qui décide de se forger sa propre destinée, de faire sa propre fortune, malgré les batons que la vie lui met dans les roues. J’aime qu’elle n’abandonne personne en route, ni son alcoolique de père, ni son infidèle de mari. Du caractère, elle en a pourtant. Mais autre époque, autres mœurs, et elle a du cœur notre flamboyante jeune femme ! Des gourous de secte aux banquiers crapuleux, des soldats graveleux aux regards scrutateurs des autres femmes, elle ne recule devant rien pour mener à bien son projet. Elle vit de vrais moments de bonheur, court mille dangers, mais toujours, elle avance. Peut-être qu’au fond, c’est ça, vivre. Juste avancer. Un roman court et efficace, sans fioriture.

Pour info :
éditions Pocket, 350 pages, 8€

Publié dans BD, Bouquinade

Et à la fin, ils meurent (Lou Lubie)

Ami du jour, bonjour !

Tu le sais ou tu ne le sais pas, mais moi, j’aime bien les contes de fées. Mais ce que j’aime par dessus tout, c’est tout ce qui se fait autour. Les réécritures, of course, mais aussi les spéculations qui les entourent, les débats, les théories psychanalytiques. Et puis leurs origines ! Pour toutes ces raisons, c’était LE livre que je devais lire (et nettement moins lourd à bouffer que Psychanalyse des contes de fées, de Bettelheim, qu’un jour je lirai, c’est sûr, parce que le sujet est passionnant).

Sarakontkoi ?
Il s’agit d’une sorte d’essai illustré sur les contes de fées, qui s’appuie principalement sur les versions de trois auteurs/duos : Basile, Perrault et les frères Grimm. Je dis « principalement » parce qu’on va bien entendu évoquer d’autres auteurs. En s’appuyant sur quelques exemples choisis, Lou Lubie montre que les contes sont des marqueurs sociaux de leurs époques, et nous guide ainsi dans la compréhension de leur portée culturelle.

Tenpenskoi ?
Pour commencer, c’est très bien exécuté. C’est fin, drôle et clair. Donc pour tout public. On y découvre des contes éculés, d’autres dont on n’a jamais entendu parler. Mais surtout, on se régale à découvrir les subtilités de chaque version. Si vous connaissez les dessins de Lou Lubie, vous savez qu’ils sont légers et colorés, comme des petits bonbons ! En revanche, ne vous attendez pas à trouver les personnages, phylactères et autres textes sagement rangés dans des cases. C’est à la one again ! Mais on aime, on aime !

J’ai appris plein de trucs (que je me suis empressée d’oublier, mais ça me donnera l’occasion de le relire…), mais tout de même, j’ai refermé le livre en me disant que j’aurais aimé que ce soit un peu plus approfondi, parce que certaines pages tenaient presque de l’anecdote quand j’aurais aimé plonger dans des explications socio-culturelles poussées… j’exagère, oui, ça aurait été un peu lourd. Et le média ne se prête pas à une analyse profonde, mais tout de même, je n’aurais pas craché sur quelque chose de plus creusé. Ça reste néanmoins très bien articulé et un très bon point de départ pour qui s’intéresse au sujet. Le livre est beau à l’intérieur comme à l’extérieur, les tranches dorées et le signet ajoutent un petit bling bling luxueux bienvenu. Et puis, rien que pour l’humour de Lou Lubie, ça vaut le coup !

Pour info :
éditions Delcourt, 248 pages, 24.95€

Publié dans Bouquinade, Roman

Date me Bryson Keller (Kevin van Whye)

Ami du jour, bonjour !

Il y a quelques mois sont apparus sur les rayons des librairies les romans d’une nouvelle maison d’édition (enfin, un nouvel imprint en fait, c’est-à-dire un nom commercial sous lequel une maison d’édition publie un ouvrage, en l’occurrence, Korrigan est un imprint de City). Je sortais de mon obsession pour Heartstopper (parce qu’en vrai, combien de fois peut-on regarder la même saison de la même série, et relire les livres, sans commencer à tourner en rond ?) Bref, je cherchais à prolonger le plaisir, dans la même ambiance. Et voilà que je vois ce titre ; je le demande sans grand espoir à la community manager… qui me l’envoie ! Mais alors, est-ce que ça valait le coup de vous faire une intro aussi longue ?

Sarakontkoi ?
Pour Bryson Keller, beau gosse populaire du lycée, l’amour adolescent, ça ne vaut pas grand chose et ça ne dure jamais. D’ailleurs, pour illustrer son propos, il fait le pari de sortir avec une personne différente chaque semaine, la première qui lui demandera de sortir avec lui le lundi matin. Une règle : rien de physique. Agacé par ce petit jeu et le bazar que ça met au lycée, le timide Kai relève le défi la dernière semaine. Parce que Bryson n’a jamais précisé que seules les filles pouvaient jouer…

Tenpenskoi ?
Trêve de suspens, oui ça valait le coup ! La preuve, je l’ai conservé dans ma bibliothèque. Est-ce que j’ai retrouvé l’ambiance Heartstopper ? Totalement. Bryson est totalement un Nick : droit dans ses bottes, fait ce qu’il dit, et explore les possibilités qui s’offrent à lui. Il se pose les bonnes questions, et ça fait du bien ! Bien entendu, on ne peut pas s’attendre à ce que cette révélation soit acceptée par tous ses proches…

Si le style n’a rien de très original ; on aime les personnages, leurs doutes, leurs erreurs. On s’agace pour, avec ou contre eux. J’avoue que la relation de Bryson avec sa mère est apaisante. Celle de Kai avec ses parents est touchante, jusqu’à son coming out, douloureux, qui confronte l’amour parental aux idéologies religieuses, entre autres… les scènes de coming out sont d’ailleurs directement inspirées du vécu de l’auteur. Gros big up à la petite sœur de Kai, véritable soleil sur ce passage compliqué. Le roman ne fait pourtant pas dans le drama (en dehors d’une ou deux scènes), donc si vous avez besoin d’un truc tranquille et apaisant, d’une chouette romance (que je trouve parfaite pour l’été), j’ai envie de dire foncez !

Pour info :
éditions Korrigan, trad. de Raphaëlle O’Brien, 304 pages, 17.90€

Seul un monstre (Vanessa Len)

Ami du jour, bonjour !

Quand je dois me replonger dans mes stories de l’an dernier pour pouvoir parler correctement d’un roman, c’est qu’il a fait petite impression sur moi… Et c’est effectivement le souvenir que j’en avais !

Sarakontkoi ?
Joan, 16 ans, passe l’été chez la famille de sa mère disparue. Pour tuer le temps, passionnée d’histoire, elle travaille dans un musée du coin où elle fait la connaissance du charmant Nick. Tout bascule lorsqu’elle découvre que sa famille a le pouvoir de voyager dans le temps en volant des minutes, des heures, des jours de vie aux humains ; que c’est elle, le monstre de son histoire ; que les chasseurs de monstres menacent toute sa lignée et celles des autres voyageurs du temps… Elle est face à un dilemme : sauver sa famille et devenir à son tour un monstre, ou bien rester humaine et abandonner son clan aux chasseurs.

Tenpenskoi ?
Je ne vais pas mentir, j’ai été très intriguée par ce titre qui promettait une histoire originale dans son sujet et dans ses personnages. Prendre le parti de raconter l’histoire du côté de ceux qui sont censés avoir le rôle d’antagonistes, c’est culotté. Ils sont ceux qui sont un danger pour les humains, et pourtant, on ne peut s’empêcher de trouver cruels et injustes ceux qui les pourchassent. Ça partait très bien. Tu étais à ça, livre, à ça !

Et puis tu m’as étouffée de ton style lourd, rongé de périphrases qui me perdent dans les scènes d’action et créent des répétitions assez pénibles (plus de 40 occurrences pour « la jeune sino-britannique », 61 pour « le jeune Oliver »). Et quand tu as cinq gars qui s’envoient des mandales et qu’un seul personnage peut être désigné par au moins quatre périphrases différentes, tu imagines le gloubiboulga ? Je te le donne en mille petit génie, ça fait 20 pronoms, prénoms et expressions en tout. On dirait une orgie !

Pompon sur la Garonne, j’ai trouvé les personnages insipides, au point que les pires horreurs peuvent leur tomber dessus (et c’est le cas, on assiste littéralement à une scène de massacre), je m’en tamponne les oreilles avec une babouche grecque, la faute à une construction superficielle qui ne m’a laissé le temps ni de m’attacher aux protagonistes, ni d’être curieuse de leur éventuelle évolution.

Dans l’absolu, j’ai lu pire. Mais sincèrement, un tel roman aurait mérité d’être retravaillé, tant dans sa structure que dans son style. C’est ciao.

Pour info :
éditions Lumen, trad. de Mathilde Tamae-Bouhon, 416 pages, 16€

Publié dans Bouquinade, Litté de l'imaginaire (SF, Fantasy, Fantastique)

Dents de soie (Maëlle Desard)

Ami du jour, bonjour !

Me voici de retour après un été peu productif, et néanmoins guère reposant. Qu’à cela ne tienne, on s’y replonge, avec ferveur et moult thés glacés, parce qu’après tout, c’est pour l’amour de la littérature… et de Maëlle, bien entendu.

Sarakontkoi ?
Navi en est certaine, elle est la meilleure des fées de sa promotion… probablement de ces derniers siècles. D’ailleurs, elle sait qu’elle va intégrer l’élite : les fées marraines. Mais si son univers est rose bonbon, le monde, lui, est teinté de zones d’ombre ; elle finit chez les fées des dents à récupérer les chicots sous les oreillers et à soigner des molaires négligées. Elle doit absolument prouver qu’il y a eu erreur. Pour ce faire, la première étape, c’est de se trouver une PP (Princesse Potentielle) et de l’aider à atteindre son happy ending. Il se pourrait d’ailleurs qu’elle en ait trouvé une en la personne de Devin, un vampire taciturne sans canines réduit en esclavage dans un clan ennemi…

Tenpenskoi ?
Les romans de Maëlle, c’est toujours un délice, la sauce 1954 sur mes chili cheese, mon granité à la pomme en pleine canicule, ma moussaka authentique dans ce petit resto grec paumé dans les collines hellènes… Bref, je ne suis jamais déçue. D’ailleurs, je n’ai que son nom à la bouche dans mes conseils. Un truc drôle : Maëlle. Un truc émouvant : Maëlle. Un truc pour se détendre : Maëlle. Un truc original… t’as compris le concept. Je suis toujours transportée de voir que son lectorat s’agrandit à chaque roman (même si je suis toujours un peu jalouse parce que, faut pas déconner, moi j’étais là day one !… ou presque).

Ce roman ne fait pas exception. Navi, comme Esther (et c’est ce que j’aime chez ces deux jeunes femmes), n’a pas sa langue dans la poche. Elle SAIT qu’elle est la meilleure. Alors se retrouver en bas de l’échelle sociale ? No way ! Et puis, c’est un personnage expansif, du genre explosif, qui prend de la place. Parce que plus une fée est puissante, plus elle est énorme. Et Navi est très très très puissante… Surtout ne pensez pas que parce qu’elle est badass, c’est pantalons et tuniques confortables, nooooon. Navi aime le rose, les robes somptueuses, et être éblouissante à chaque instant. Christina Cordula, tu n’as qu’à bien te tenir.

Et que dire de Devin, ce vampire révolté, humilié et empli de rage silencieuse qui, au premier coup d’œil, tombe sous le charme de son éblouissante fée marraine improvisée ? On adore s’en moquer avec elle, des vampires taciturnes de Maëlle !

La première fois que Maëlle m’a parlé de son roman, je me suis dit « mais WTF ?! » et en même temps, je savais. Je savais qu’avec sa plume, son verbe, et son imagination un brin tordue, on allait arriver à un truc barré, d’une qualité impeccable, et drôle de surcroît. En fait, je ne sais même plus quoi dire pour te convaincre de te plonger dans ce bouquin. Juste, fais-y, comme on dit chez moi…

Pour info :
éditions Slalom, 400 pages, 16.95€

Publié dans Bouquinade, Roman

Les Mystérieux Enfants de la nuit (Dan Gemeinhart)

Ami du jour, bonjour !

Je te l’ai probablement déjà dit, les livres que je préfère sont ceux que je n’attendais pas. Celui-ci, je l’ai lu en 2021, lorsque son éditrice française m’a envoyé le manuscrit en me demandant de lui rendre une fiche de lecture. Quand je l’ai lu, j’ignorais qu’il s’agissait d’un roman de Dan Gemeinhart, dont j’avais adoré L’Incroyable Voyage de Coyote Sunrise. C’est en rédigeant ma fiche que j’ai souri, et qu’une petite voix à susurré : « bien sûr… »

Sarakontkoi ?
Ravani Foster, 12 ans, vit dans la triste ville de Bourg-Boucherie, nommé d’après l’abattoir qu’elle abrite. La communication avec ses parents est rompue, il est maltraité par les petites brutes de son collège. Tout change lorsqu’arrive en ville une étrange fratrie aux parents peu présents, qui semble cacher un « secret terrible et magnifique »…

Tenpenskoi ?
Qu’il est bon de lire un roman qui valorise les enfants, sans avoir besoin de magie, de paillettes, ou de rires forcés ! Ces gamins sont d’une rare sincérité, mais surtout d’une gravité que peu de romans accordent à des personnages si jeunes (j’ai pensé naturellement à Adam, chez Gaiman et Pratchett, et aux orphelins chez Klune). Ici, il n’est pas question de problématiques futiles, de paraître ou de popularité. On y parle de solitude de l’âme, de choix, de vérités. D’ailleurs, c’est ainsi que Dan Gemeinhart fait référence à ses personnages : des âmes. Des âmes qui se cherchent, se trouvent, se répondent. La magie à laquelle font référence les enfants relève plutôt d’une intelligence émotionnelle, d’une intuition, ou d’habiletés. Le tout, porté par la simplicité et l’efficacité de la plume de son auteur, ne pourra toucher ton petit cœur de lecteur.

Le roman incite à chercher en nous l’étincelle qui nous rend spécial, à accepter d’être encore inachevé, en route vers ce que l’on est vraiment. C’est un réel parcours initiatique, une lecture déchirante parfois, apaisante souvent. Pour écrire ce billet, j’en ai d’ailleurs relu quelques passages, et devine quoi… j’ai pleuré. Encore. Je ne sais pas comment se débrouille Dan Gemeinhart pour faire mouche à chaque fois, mais ce type, il en a sous le clavier, laisse-moi te le dire. Bref, la typo du titre est un peu « meh », l’illustration est très enfantine, mais ne t’y fie pas, c’est une pure merveille.

Pour info :
éditions PKJ, trad. de Isabelle Troin, 480 pages (écrit gros), 18.90€

Publié dans Bouquinade, Roman

3 fois l’été (Elizabeth Barfety)

Ami du jour, bonjour !

Qu’il est bon de se plonger dans sa PAL de dinosaures et d’en tirer un roman un peu inattendu… ça donne l’impression de faire l’école buissonnière du SP, et d’être incroyablement libre !

Sarakontkoi ?
Maëlle, 16 ans, vient d’emménager avec sa maman dans un nouvel appartement suite au divorce de ses parents. Sa meilleure amie Lucie est partie passer les vacances à la campagne. Pour tuer le temps, Maëlle trouve un job d’été au cinéma de son quartier, et décide en parallèle d’ouvrir un conte Videoz pour y créer son propre contenu. Durant son été, elle fait trois rencontres. Chacune d’elle a du potentiel. Mais lorsque les trois garçons en question lui proposent de sortir le même soir, elle doit faire un choix… et toi aussi, lecteurice.

Tenpenskoi ?
J’aime bien tomber sur des romans dont je n’attends pas grand-chose, mais qui m’attrapent quand même. Celui-ci, sans être un coup de cœur, s’inscrit dans la veine des romans agréables à lire cet été. Il est très court, et comporte en tout 3 scénarii. Alors forcément, on va à l’essentiel, parfois on passe rapidement sur 2-3 trucs et on prend des raccourcis, mais toujours au service du propos… qui s’est avéré étonnamment profond. On prend le temps d’aborder des sujets comme la reconstruction, le rêve de célébrité de plus en plus présent chez les jeunes, le harcèlement sur internet et les coups de cœur amoureux fulgurants chez les ados.

Et pour le coup, c’est un vrai roman pour ado ! Je le disais sur les réseaux, mais souvent, je passe de romans très infantilisants à des romans hyper sexualisés (où la mention « jeunes adultes » semble vouloir excuser les manques scénaristiques et les scènes de sexe décomplexées et vides de sens). Là, on aborde des thématiques contemporaines, avec une héroïne certes parfois naïve (quel ado ne l’est pas ?) mais tout à fait crédible dans ses réflexions, dans sa manière de sauter sur les conclusions, de s’emporter, de tout prendre à cœur. Le petit côté « choisis ton histoire » est très chouette, même si on finit par tous les lire (et perso, j’avais fait le mauvais choix, même si je le pensais raisonnable). Chaque fin amène sa pierre à l’édifice et fait grandir Maëlle de manière différente. Bref, un roman très cool, léger, parfait pour emporter sur la plage !

Pour info :
éditions Milan, 256 pages, 14.90€

Publié dans Bouquinade, Litté de l'imaginaire (SF, Fantasy, Fantastique)

Six couronnes écarlates, T1 (Elizabeth Lim)

Ami du jour, bonjour !

Une fois n’est pas coutume, je te parle d’une sortie récente (je suis dure avec moi-même, ça m’arrive tout même de temps en temps). Un roman que j’ai lu avec mes copines de lecture commune, j’ai nommé Charlotte et Marilyn. Et pour une fois, c’était moi le chat noir…

Sarakontkoi ?
Toute magie a été bannie du royaume de Kiata. La princesse Shiori est promise à un seigneur de petite lignée qu’elle refuse d’épouser. Lorsqu’elle surprend sa belle-mère en plein rituel, celle-ci transforme ses six frères en grues, et lui interdit de parler ou de dévoiler son identité sous peine de tuer ses frères. Commence pour Shiori un long voyage à travers son royaume pour tenter de sauver ses frères et de lever la malédiction.

Tenpenskoi ?
Je ne vais pas passer par quatre chemins, je suis très mitigée. D’autant plus que j’ai lu le roman avec des copines qui, elles, ont adoré ! Pour commencer, un gros big up sur le choix du conte qui est à la base de cette réécriture (parce que c’en est une), une sorte de mélange entre Les Cygnes sauvages d’Andersen et Les Six Cygnes des frères Grimm. Il partait donc sur un bon point puisqu’il entrait pour moi dans la catégorie des contes peu repris (coucou D’Or et d’oreillers avec La Princesse au petit pois, et La Malédiction de Highmoor avec Le Bal des douze princesses). Alors c’est vrai que sur la fin, je n’ai pas lâché le bouquin, que ça se lit facilement, même si le style n’est pas fou. Il y a quelques fulgurances narratives, et oui, pourquoi pas le transposer dans un univers japonisant puisque c’est la mode… Donc en soi, pas une lecture désagréable.

Mais tu imagines bien qu’il y a un « mais »… Je ne m’y sentais pas bien. J’ai trouvé que ça manquait de contexte, et que le peu qui nous était donné n’était pas clair (plusieurs fois j’ai levé les yeux en me disant « hein ? »). Reprendre un conte, c’est cool, mais il faut l’étoffer, et surtout l’approfondir. Ici, c’est étoffé, on y a ajouté de l’action, des trucs qui n’existent pas dans le conte, d’ailleurs on part sur tout autre chose à la fin. Mais voilà, c’est tout ce qu’on a fait, l’étoffer et y ajouter de l’action. Personnellement, j’ai besoin de savoir qu’un royaume a du vécu, un peu comme si je débarquais dans un univers hyper rodé ; c’est ça qui permet de sortir du format « conte » où le lecteur est censé accepter des faits établis. Là, on me dit « il s’est passé ça il y a des milliers d’années, mais on a tout oublié depuis, sauf une légende ». Ok.

Beaucoup de facilités (vous reprendrez bien un peu scenarium Madame), notamment, et je ne divulgache rien puisque c’est littéralement le premier chapitre, la princesse qui fuit de sa cérémonie de fiançailles parce que son oiseau en papier s’est envolé (pourquoi ?) et qu’elle le suit et plonge dans le lac. Ca n’a aucun sens. Déjà, ça partait mal. De plus, si je suis en point de vue interne (donc dans la tête de la protagoniste), que je ne vois que ce qu’elle voit, qu’on a les mêmes éléments de réflexion et que je devine un truc et pas elle, ça me gonfle. Et c’est comme ça tout le long. Du coup, ce n’est pas une mauvaise lecture, il en ressort tout de même du positif (quelques twists sympas, les relations entre les personnages, la complicité, la duplicité) mais trop d’éléments approximatifs et mal maîtrisés pour que je sois à l’aise dans ma lecture. Dommage, le livre est joli. D’ailleurs Rageot, ça serait sympa de préciser que c’est un tome 1…

Pour info :
éditions Ragot, trad. de Sophie Lamotte d’Argy, 560 pages, 18.90€